Interrogée sur la politique de la France au Yémen, la ministre française des Armées a montré une gêne manifeste. Entre livraison d’armes et appel à l’ouverture de corridors humanitaires, Florence Parly a préféré user de la langue de bois.
Lors de l’émission Quotidien diffusée le 23 février, le journaliste Baptiste des Monstiers est revenu sur la guerre au Yémen, et notamment sur la position de la France dans le conflit. Photos à l’appui, et s’appuyant sur le rapport parlementaire de 2017 sur les exportations d’armement de la France, où l’on apprend que l’Arabie saoudite était entre 2007 et 2016 le second client des fabricants d’armes français, il a alors rapporté que les armes vendues par Paris à l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, qui mènent des campagnes de bombardement au Yémen, étaient utilisées contre les populations civiles.
A partir de ces informations, le journaliste a donc décidé d’interroger la ministre des Armées, Florence Parly, lors de son déplacement le 22 février sur la base aérienne d’Avord, près de Bourges. Alors qu’elle venait d’effectuer un discours, le journaliste l’a interpellée : «Compte tenu de la crise qui se déroule actuellement au Yémen, est-ce que la France peut continuer à livrer des armes à l’Arabie saoudite et aux Émirats ?»
Visiblement surprise et gênée par la question, la ministre des Armées s’est contentée de déplorer «une épouvantable crise humanitaire» et «un drame humain». Insatisfait de la réponse, le journaliste, insistant, lui a alors demandé s’il était nécessaire de «maintenir la pression sur l’Arabie saoudite et les Émiratis» afin de les contraindre à arrêter leurs opérations militaires, ou si la France devait «garder le silence et continuer à leur livrer des armes».
Face à cette nouvelle tentative du journaliste, Florence Parly a une énième fois évité de répondre clairement, se bornant à affirmer que la France n’était pas silencieuse face à cette situation et qu’elle réclamait la mise en place de «corridors humanitaires».
La France doit-elle continuer à vendre des armes aux pays qui bombardent des populations civiles comme au Yémen ? @BdesMonstiers a posé la question à la ministre des Armées. Sa “réponse”. 👇#Quotidien pic.twitter.com/mQbDXRMbmL
— Quotidien (@Qofficiel) 23 février 2018
«Je vous répète que nous avons des procédures et que par conséquent naturellement si de nouveaux contrats devaient être passés avec ces pays, ils passeraient au crible des critères que j’ai rappelés. Je ne peux pas être plus précise», a-t-elle fini par lâcher.
L’insistance des questions a visiblement agacé la ministre qui a précipitamment quitté les lieux en oubliant presque de saluer la préfète. Pour s’expliquer de cet impair, elle lui a expliqué être «confuse», précisant : «Je suis tellement en colère contre ces gens.»
Le Yémen : une crise oubliée ?
S’il fait moins la une des médias occidentaux que d’autres pays comme la Syrie, le Yémen est en proie depuis 2014 à une sanglante guerre civile qui oppose les rebelles chiites houthis, initialement proches de l’ancien président Ali Abdallah Saleh (qu’ils ont fini par tuer le 4 décembre 2017 après un retournement d’alliance de celui-ci), aux partisans d’Abd Rabbo Mansour Hadi, le président du pays, qui vit en exil en Arabie saoudite depuis 2015.
Une coalition de pays arabes dirigée par l’Arabie saoudite intervient militairement dans le conflit depuis mars 2015 afin de rétablir Abd Rabbo Mansour Hadi dans ses fonctions. Les ONG humanitaires dénoncent depuis le début le caractère aveugle et meurtrier des bombardements réalisés par cette coalition, ainsi que de multiples violations des droits de l’homme.
Selon l’ONU, le conflit a fait plus de 8 750 morts, dont de nombreux civils et la situation humanitaire sur place ne cesse de se détériorer. Une épidémie de choléra a déjà touché plus d’un million de personnes, d’après le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
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Source: RT