Nutella lance dimanche une campagne de publicité sur la “qualité”, selon Ferrero, de cette pâte à tartiner qui contient plus de 85% de sucre et de matières grasses, au grand dam de l’Agence nationale de sécurité sanitaire.
“Nous entendons garder une position forte sur le marché français et continuer à développer” Nutella alors que la “marque alimentaire préférée des Français a été très critiquée ces dernières années”, expliquait mi-janvier le président directeur général de Ferrero France Jean-Baptiste Santoul, présent sur le site de Villers-Ecalles, près de Rouen, premier site de production au monde de cette gourmandise composée à 56,3% de sucre et à 30,9% de matière grasse.
Il présentait alors aux médias cette campagne vantant la traçabilité des ingrédients de Nutella et dont “la première vague” est prévue “tout au long du premier semestre 2018”.
Loin des récentes images de ruées vers les pots de Nutella bradés, cette offensive intervient dans un contexte de légère baisse sur cinq ans des ventes en magasin de Nutella en France, admet Christophe Bordin, directeur de relations extérieures de Ferrero France, interrogé par l’AFP.
Le groupe familial ne communique pas d’autres données que son chiffre d’affaires (10,33 milliards d’euros sur l’exercice 2016 dans le monde, en hausse de 8,2% par rapport à 2015). Mais Michele Ferrero, le père du Nutella, décédé en 2015 après avoir quitté la présidence du groupe en 2011, était considéré comme l’homme le plus riche d’Italie par le magazine Forbes. Nutella représente un tiers des volumes produits par Ferrero.
Avec cette campagne, l’entreprise persiste et signe sur l’huile de palme dont Nutella est composé à 20% environ, selon Ferrero qui en achète 185.000 tonnes par an dans le monde mais “certifiées durables”.
– ‘Sans intérêt nutritionnel’ –
Selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) pourtant, l’huile de palme, dont la mention est obligatoire depuis 2014 sur les produits qui en contiennent, est “sans intérêt nutritionnel” et contient des acides gras saturés qui “en excès peuvent favoriser les maladies cardiovasculaires”.
Sur le marché, on trouve d’ailleurs désormais des pâtes à tartiner dans lesquelles l’huile de palme a été remplacée par exemple par l’huile de colza aux propriétés nutritionnelles reconnues et peu chère.
Mais Ferrero interrogé sur ce point dit soupçonner ces produits concurrents de contenir des acides gras trans, encore plus nocifs que les acides gras saturés palmiques. “Un argument scandaleux. Le problème des acides gras trans est résolu depuis longtemps en Europe occidentale”, assure à l’AFP Olivier Andrault de l’UFC Que Choisir.
Au delà, “ce type de produit, c’est une bombe calorique avec, contrairement à la confiture ou au beurre, un intérêt nutritionnel quasi nul. Pour le sucre, c’est une catastrophe. Il ne se voit pas. Si vous mettiez la même quantité de sucre dans votre café, vous seriez effrayé”, résume la professeure Irène Margaritis, cheffe de l’évaluation de risques liés à la nutrition de l’Anses.
Le Nutella affiche 539 kcal pour 100 grammes (contre 300 kcal environ pour un cheeseburger entier). Les concurrents sont tout aussi caloriques.
A l’heure où “on a un très fort problème avec les gens qui consomment trop de sucre” et “un problème aussi avec les gens qui consomment trop de gras”, l’Anses plaide pour “des mesures visant à limiter l’incitation à la consommation de produits sucrés (dont ce produit fait partie)”, dont l’excès peut entraîner “surpoids, obésité et maladies qui y sont associées de façon indirecte comme le diabète de type 2, des maladies cardiovasculaires, certains cancers”.
“Ce n’est pas la peine d’inciter les gens, de toute façon, ils adorent ça. Il faudrait qu’il y ait des campagnes d’information visant à donner à ces produits la place qui leur revient, occasionnelle”, ajoute Mme Margaritis.
Pourquoi l’huile de palme tue les orangs-outans – une brève histoire
Sources : Sciences et Avenir / PanEcoSwitzerland