L’association anticorruption Anticor, a déposé plainte pour favoritisme dans le marché de ces nouveaux radars embarqués, qui n’aurait pas fait l’objet d’un appel d’offres.
L’association anticorruption Anticor a déposé plainte pour “favoritisme” dans le marché des radars embarqués confié par l’État à des sociétés privées.
L’association a saisi le 18 janvier le parquet national financier (PNF) pour demander une enquête sur les conditions d’attribution de ces nouveaux marchés visant à “externaliser” au privé le pilotage de voitures banalisées embarquant des radars automatiques.
Selon cette plainte, révélée mercredi par L’Express et dont l’AFP a eu connaissance, Anticor vise “deux marchés publics faramineux” passés entre l’État et la société Fareco, filiale du groupe de BTP Fayat, “en violation totale de la législation en matière de marchés publics”. Déposée contre X, elle vise indirectement le ministère de l’Intérieur et l’entreprise.
Anticor épingle particulièrement un contrat d’un montant global de près de 53,8 millions d’euros passé le 1er février 2017 entre la place Beauvau et la société.
Problème, selon l’association: le contrat a été remporté en dehors de tout appel d’offres, “au motif que la société était la seule à détenir un certificat d’homologation” du matériel, a expliqué à l’AFP l’avocat d’Anticor, Jérôme Karsenti.
Cet argument technique rendait selon le ministère impossible toute concurrence. “Nous avons appliqué, avec toutes les contrôles nécessaires, le code des marchés publics qui dit que lorsqu’il y a un élément de propriété intellectuelle en jeu, on peut ne pas passer par une mise en concurrence”, a assuré le délégué interministériel à la sécurité routière Emmanuel Barbe, se disant “parfaitement serein”.
“J’attends qu’une enquête soit menée le plus vite possible, et nous fournirons toutes les pièces à la justice, afin d’avoir une conclusion le plus vite possible qui me semble ne pouvoir être qu’un classement sans suite”, a-t-il ajouté.
Cet argument est contesté par l’association qui le juge “inopérant”. “Fareco avait obtenu un premier marché en 2012 après une mise en concurrence dans laquelle l’obtention de ce certificat n’apparaissait pas comme une condition préalable”, fait valoir Me Karsenti.
“Quand rien n’a été fait pour qu’il y ait une saine concurrence, le risque est fort pour que cette opération coûte en réalité plus cher au contribuable”, a commenté Jean-Christophe Picard, président d’Anticor.
Fareco, qui affirme fournir déjà la moitié des radars de franchissement de feux rouges sur le territoire, soit 350, doit déployer quelques 300 véhicules de contrôle de vitesse automatisé, selon les informations disponibles sur son site internet.
L’externalisation d’une partie du contrôle routier est destinée, selon les autorités, à permettre aux forces de l’ordre de se concentrer sur ses missions premières. Elle a fait l’objet d’une expérimentation à partir de février 2017 en Normandie, avant d’entrer en vigueur dans cette région depuis décembre.
Alors que les opposants à cette mesure crient à une “privatisation”, le gouvernement martèle que les employés de sociétés privées se contenteront de piloter les voitures: les véhicules “appartiennent toujours à l’État”, les portions de contrôle sont choisies par les autorités et le système de flash ne nécessite aucune intervention humaine.
L’association Anticor dénonce elle aussi “une dérive vers une privatisation de la justice qui verrait l’État transférer peu à peu sa souveraineté sur ses missions régaliennes à des personnes privées”, selon Me Karsenti.
Anticor avait déjà déposé une première plainte en novembre 2015, soupçonnant la société de services numériques Atos d’avoir été favorisée dans l’attribution de quatre marchés publics concernant le parc des radars automatiques, pour un montant cumulé de plus d’un milliard d’euros. Le parquet national financier avait ouvert une enquête pour favoritisme et prise illégale d’intérêts en mars 2016.
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Source : Le Dauphine