Applaudissements lundi 2 février pour Claude Goasguen au Palais palais Brongniart (et même quelques « bravo »).
Ce jour-là, invité par l’organisation KKL (qui se présente comme une « ONG verte » collectant des fonds en France « en vue de réaliser des projets concrets en Israël »), le maire UMP du XVIe arrondissement de Paris participait à une table ronde. Le thème : « antisionisme et antisémitisme ».
A cette occasion, il a salué l’action du gouvernement concernant l’affaire Dieudonné, « un individu […] qui faisait rire aux dépends de la Shoah. » Sur ce thème, l’élu poursuit :
« [La Shoah, qu’] on n’ose plus enseigner dans les lycées, tant on a peur de la réaction des jeunes musulmans qui ont été drogués dans les mosquées. »
Publiée sur le site de « journalisme subversif » Panamza (subversif et controversé, puisque son créateur est convaincu de l’implication d’Israël dans les attentats du 11 septembre), cette vidéo a fait l’objet d’un article paru ce dimanche 9 février sur Al Kanz, qui ne se contente pas d’une simple reprise et conclue :
« En cette période pré-électorale, il va être intéressant de demander à Jean-François Copé, président de l’UMP avec François Fillon, de se positionner par rapport à ces propos scandaleux. Soyons nombreux à écrire au maire de Meaux en lui demandant une condamnation la plus ferme qui soit. […] Voici son email : jfcope@assemblee-nationale.fr. »
Il persiste et signe. Vendredi, convoqué au tribunal, le député-maire Claude Goasguen a maintenu ses propos -hostiles aux jeunes musulmans pratiquants- qui furent découverts et publiés par Panamza.
Souvenez-vous : le 7 février, Panamza révélait la déclaration islamophobe tenue par un député-maire UMP lors d’un colloque organisé à Paris par le “Fonds pour l’existence d’Israël” (KKL en hébreu), groupuscule juif et ultra-sioniste.
Cette Shoah qu’on n’ose plus enseigner dans les lycées tant on a peur de la réaction des jeunes musulmans qui ont été drogués dans les mosquées.
Ce propos avait suscité une plainte pour “diffamation et incitation à la haine raciale” par le Conseil français du culte musulman , le MRAP et le CRI.
Mise en ligne par Panamza, la vidéo de sa déclaration avait été censurée ultérieurement par Youtube en raison d’une réclamation effectuée par l’association à l’origine du film: le KKL, organisation transnationale qui avait auparavant célébré le discours de Claude Goasguen via Twitter.
Les images –relayées également par BFM TV– avaient néanmoins pu être visionnées par des dizaines de milliers d’internautes dont certains ont remis depuis la vidéo en ligne.
Ancien militant d’extrême droite fiché par la police et fervent soutien du régime colonial et ségrégationniste de Tel Aviv (il est, entre autres fonctions occupées dans la mouvance sioniste associative, vice-président du groupe parlementaire France-Israël), Claude Goasguen avait déjà exprimé, neuf mois plus tôt et lors d’un autre colloque pro-israélien (organisé par l’UPJF), des propos méprisants et diffamatoires à l’égard du “musulman de service”, figure décrite par le député-maire comme un antisémite en puissance.
Depuis la triple plainte déposée à son encontre, Claude Goasguen –récemment accueilli par Dalil Boubakeur, président du CFCM– a semblé, dans un premier temps, vouloir rétropédaler.
Dimanche 27 juillet, lors d’une interview diffusée par I Télé et accordée au journaliste-militant sioniste Claude Askolovitch, le député-maire a ainsi présenté ses excuses à la communauté musulmane {à 6′ de la vidéo}.
Cela n’a visiblement pas dissuadé Abdellah Zekri -l’homme du CFCM (et ex-militant UMP) chargé de “l’Observatoire national contre l’islamophobie”– de maintenir sa plainte à l’encontre de Claude Goasguen. Absent lors d’une comparution prévue initialement le 11 septembre, l’homme s’est présenté –vendredi dernier– au tribunal correctionnel de Nîmes.
Droit dans ses bottes
“Je ne m’excuse de rien. C’est de mon droit de dire les choses et la vérité”, a déclaré Claude Goasguen en s’appuyant -à défaut d’avoir fait venir les soutiens initialement évoqués (Luc Ferry, Xavier Darcos, Marc Knobel)- sur un rapport controversé de l’inspection générale de l’Éducation nationale datant de 2004 et abordant la question de l’enseignement de la seconde guerre mondiale. Jugement mis en délibéré au 16 janvier.
Assisté de deux avocats (le Nîmois Philippe Expert et Jean-Marc Fédida, inscrit au Barreau de Paris et celui –bientôt– d’Israël), le deputé-maire UMP a également dévoilé une singulière tentative de conciliation si l’on en croit Objectif Gard, site d’information local.
Au cours de la séance, M. Goasguen a déclaré avoir tenté de trouver un arrangement entre les deux parties et l’avait invité à participer à une réunion avec des membres de la communauté juive, ce que M. Zekri avait refusé.
Claude Goasguen, représentant -supposé laïc- du peuple français à l’Assemblée nationale et délégué-médiateur de “la communauté juive”?
À vrai dire, cette information ne devrait pas surprendre les lecteurs à la mémoire pointilleuse. Les propos tenus par Goasguen au sujet des “musulmans drogués” n’ont pas été prononcés dans un cénacle UMP ou sur le plateau d’un talk-show mais lors d’un gala du KKL.
But affiché de cette organisation semi-gouvernementale liée aux autorités israéliennes: favoriser le développement environnemental de l’État hébreu. Selon ses critiques, tels Amnesty International et le mouvement BDS, le KKL confisque et exproprie des propriétaires terriens palestiniens avant d’effacer leurs traces à travers une reconfiguration écologique de la superficie acquise par le “rachat” ou par la force.
Surprise, surprise: du 5 au 11 novembre, le KKL a organisé un séjour en Israël –“dédié aux accomplissements du sionisme”– en compagnie d’élus franciliens et de parlementaires français (notamment l’UDI Meyer Habib, le socialiste François Pupponi et l’UMP Geoffroy Didier). Était également présent François d’Orcival, président du comité éditorial de l’hebdomadaire anti-musulman et ultra-sioniste Valeurs Actuelles.
— KKL France (@FranceKKL) 10 Novembre 2014
Dimanche 9 novembre, Claude Goasguen devait ainsi accompagner –selon l’agenda de l’UMP– sa consoeur Valérie Pécresse pour rencontrer les Français d’Israël à l’Hôtel David Intercontinental de Tel Aviv.
Ce jour-là, l’homme n’était pas dans la capitale de l’État hébreu. Grippe automnale? Coup de fatigue au surlendemain du meeting parisien de Nicolas Sarkozy, ce “chef charismatique que nous attendions depuis 2012”?
Pas du tout.
L’islamophobie est une drogue dont les dealers ont pignon sur rue
Au coeur du séjour organisé par le KKL et le jour même de la réunion UMP prévue à Tel Aviv, Claude Goasguen, défavorable au prochain vote parlementaire sur la reconnaissance de la Palestine, co-organisait, dans les salons de sa mairie, “le 19ème salon des écrivains” réunis par le B’naï Brith, “lobby” juif et ultra-sioniste.
Rappel : comme l’avait récemment dévoilé Panamza, cette organisation avait convié, l’an dernier et au même endroit, Fabien Engelmann, conseiller social de Marine Le Pen, nouveau maire FN d’Hayange et auteur d’un livre hostile à l’islam.
En lutte déclarée contre “l’intoxication” de “l’islamisme”, Claude Goasguen ne redoute visiblement pas d’intoxiquer les citoyens en leur octroyant un autre stupéfiant, davantage banalisé dans la société française de 2014: la stigmatisation du musulman.
HICHAM HAMZA
Bonus : l’illustration en images du zèle sioniste de Claude Goasguen, désireux de poser au plus près de l’ambassadeur d’Israël…
Post-scriptum : le 23 janvier 2015, le tribunal correctionnel de Nîmes s’est finalement déclaré “incompétent” pour juger Claude Goasguen en diffamation. L’avocate d’Abdellah Zekri a renoncé à faire appel.
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Source(s): Hicham Hamza 17 novembre 2014 / YouTube / Rue89, le 10 février 2014 / Relayé par Meta TV
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