"Une action urgente était nécessaire", a assuré la directrice générale du Fonds, Christine Lagarde, à l'issue d'une réunion du conseil d'administration du FMI, qui représente ses 188 États-membres.
Ce feu vert de l'institution permet le déblocage "immédiat" d'un premier prêt de 3,2 milliards de dollars à Kiev. Il va donner un peu d'air à un pays au bord de l'asphyxie financière et contraint de régler d'importantes factures de gaz à son voisin russe.
L'accord du FMI, qui envisageait jusqu'ici un plan d'aide compris entre 14 et 18 milliards, devrait également ouvrir la voie à d'autres donateurs (Union européenne, Banque mondiale…) afin de parvenir à un plan de sauvetage global de 27 milliards de dollars.
Un programme d'économies drastique
Mais les prochains prêts de l'institution ne seront débloqués que par étapes et à la condition que Kiev applique un programme d'économies drastique censé, selon le Fonds, poser les bases d'une croissance "durable" tout en protégeant les "plus vulnérables".
"Il y a des risques liés à la mise en oeuvre" de ce programme, a reconnu Christine Lagarde, évoquant notamment les tensions "géopolitiques" entre Kiev et Moscou.
Mercredi, les forces armées ukrainiennes ont été mises en état d'alerte pour tenter d'enrayer les mouvements séparatistes dans l'Est, un des poumons économiques du pays. La perte de ce bassin industriel, après celle de la Crimée, porterait un coup très dur au potentiel économique du pays.
Renforcement des sanctions contre la Russie
"La coopération entre toutes les parties sera extrêmement utile pour renforcer la situation économique en Ukraine," a estimé Christine Lagarde, tout en s'inquiétant d'une possible escalade de sanctions contre Moscou et de leur impact sur l'Ukraine.
Les Occidentaux ont annoncé mardi un renforcement de leurs sanctions contre la Russie, qui est officiellement entrée en récession, selon le Fonds.
"Sur le front des sanctions, tout ce qui affaiblit la situation économique (de l'Ukraine, ndlr) va remettre en cause l'application du programme", a prévenu Christine Lagarde.
La Russie exige déjà 11,4 milliards d'arriérés à Kiev au titre des réductions de prix accordées à l'Ukraine ces dernières années — un montant contesté par Kiev. La société Gazprom réclame, elle, 2,2 milliards de dollars pour ses livraisons récentes de gaz.
Élection présidentielle le 25 mai prochain
Selon la dirigeante du Fonds, les menaces qui pèsent sur le programme d'aide tiennent également à la situation politique à l'intérieur du pays.
Les autorités intérimaires à Kiev, qui avaient appelé l'institution à l'aide début mars, ont déjà donné des gages de bonne volonté en annonçant une baisse des subventions énergétiques –qui se traduira par une hausse de 50% des prix du gaz–, mesure réclamée de longue date par le Fonds.
Mais une élection présidentielle est prévue pour le 25 mai et les décisions impopulaires réclamées par le FMI risquent de mal passer dans l'opinion.
La tâche sera d'autant plus difficile que l'économie ukrainienne devrait se contracter de 5% cette année, selon les projections du Fonds, alors qu'une récession d'environ 4% était jusque-là attendue. La croissance devrait repartir (+2%) dès 2015, selon l'institution.
Les deux précédentes lignes de crédit rapidement interrompues
"Nous allons essayer de réduire ces risques au maximum", a assuré Christine Lagarde, précisant notamment que les premiers audits du FMI seraient menés tous les deux mois, au lieu de trois habituellement, pour éviter tout dérapage des comptes publics.
Le passif du pays avec le FMI ne plaide par ailleurs pas en sa faveur. Les deux précédentes lignes de crédit accordées à l'Ukraine (16,4 milliards de dollars en 2008, 15,1 milliards en 2010) avaient été rapidement interrompues face au refus des autorités de mettre en oeuvre des réformes impopulaires.
Cinq des 17 milliards annoncés mercredi devront d'ailleurs être utilisés par Kiev pour rembourser le FMI lui-même.
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Source(s) : Challenges, le 01.05.2014