Le parlement bulgare se prépare à soustraire, au moins partiellement, le gazoduc de Gazprom South Stream en chantier à l'application des normes européennes, écrit mardi le quotidien Kommersant.
Les députés souhaitent établir législativement une différence entre les gazoducs intra-européens et transfrontaliers, en statuant que le Troisième paquet énergie de l'UE ne s'appliquerait pas à ces derniers. La Commission européenne en doute et a déjà demandé des explications officielles à Sofia.
Vendredi dernier, le parlement bulgare a adopté en première lecture un projet de loi permettant de soustraire partiellement le gazoduc South Stream à l'application des normes du Troisième paquet énergie de l'UE sur son territoire national. Il s'agit d'amendements à la loi sur l'énergie instaurant la notion de "gazoduc maritime" et séparant les gazoducs en "transfrontaliers" et "interconnecteurs", reliant les systèmes d'acheminement de gaz entre deux pays de l'UE. Les députés bulgares ont conclu que la législation européenne ne pouvait pas s'appliquer aux gazoducs transfrontaliers. Cette même idée avait été suggérée auparavant par le gouvernement russe.
Ainsi, même si la Commission européenne interdisait l'acheminement du gaz sur la partie terrestre de South Stream, la Bulgarie, qui dépend aujourd'hui entièrement des fournitures de gaz russe via l'Ukraine, se garantit de facto un accès alternatif au gaz russe. La Bulgarie consomme près de 3 milliards de mètres cubes de gaz par an. L'un des auteurs du projet de loi, Tasko Ermenkov, a expliqué qu'après l'annulation du projet Nabucco, Sofia n'avait plus d'autres options de diversification des fournitures hormis South Stream. "Il est incompétent de dire que nous transgressons la législation de l'UE en sortant par ces amendements South Stream de la juridiction du Troisième paquet énergie. A priori, la partie maritime du projet n'est pas concernée par cette législation", a-t-il déclaré.
Toutefois, Bruxelles n'est pas prêt à s'y résigner et a déjà demandé des explications officielles à Sofia. "La Commission européenne est préoccupée par la compatibilité entre ces amendements et la législation de l'UE", a déclaré un porte-parole. Fin mars, le commissaire européen à l'Énergie Günther Oettinger a envoyé une lettre au ministre bulgare de l'Économie et de l'Énergie Dragomir Stoinev pour demander d'expliciter la position de Sofia. "Nous analyserons la réponse obtenue et prendrons une décision sur les actions à entreprendre", a conclu le porte-parole de la Commission.
En adoptant cette loi, la Bulgarie défendra ses intérêts. Cependant, le pays n'est qu'un des participants au projet South Stream. Pour cette raison, la Commission européenne possède d'autres leviers pour faire pression sur le projet, estime Sergueï Vakhrameïev d'Ankor Invest. Cependant, tous les pays du sud de l'Europe sont particulièrement intéressés selon lui par la construction du gazoduc au vu de l'indétermination qui entoure le transit gazier via l'Ukraine. D'après certaines sources proches du dialogue gazier UE-Russie, le litige entre Bruxelles et Sofia pourrait être réglé dans le cadre d'une large discussion sur les accords intergouvernementaux des pays participants à South Stream. Le dialogue politique entre la Russie et l'UE sur South Stream est aujourd'hui suspendu en raison des événements en Ukraine. Toutefois, les participants au dialogue côté russe avaient déclaré plus tôt que la situation n'avancerait pas d'ici l'été en raison des élections européennes et de la nouvelle composition de la Commission européenne.
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Source(s) : RIA Novosti, le 08.04.2014