Les forces spéciales kényanes combattaient toujours mardi matin “un ou deux” assaillants islamistes toujours retranchés dans l’un des étages supérieurs du centre commercial Westgate de Nairobi, près de trois jours après l’attaque lancée par un commando armé comprenant dans ses rangs des Américains et une Britannique.
Le ministère kényan de l’Intérieur avait pourtant affirmé lundi soir avoir repris le contrôle de ce centre commercial, l’un des plus huppés de la capitale kényane, où un assaut à la grenade et à l’arme automatique mené samedi par un groupe armé lié aux insurgés islamistes somaliens shebab a fait au moins 62 morts, presque autant de disparus, et près de 200 blessées.
La ministre kényane des Affaires étrangères, Amina Mohamed, a confirmé de son côté lundi soir sur la chaîne de télévision américaine PBS la présence au sein de ce commando armé de deux ou trois Américains et d’une Britannique.
La ministre a indiqué que cette Britannique avait déjà commis des actes terroristes similaires “à de nombreuses reprises”. La police kényane avait affirmé plus tôt lundi étudier les informations selon lesquelles la Britannique Samantha Lewthwaite, veuve d’un des kamikazes des attentats du 7 juillet 2005 à Londres, serait “impliquée”.
En ce qui concerne les Américains, a précisé la ministre, ce sont “de jeunes hommes, entre 18 et 19 ans (…) d’origine somalienne ou arabe, mais qui vivaient aux États-Unis, dans le Minnesota et dans un autre endroit”.
Selon les autorités kényanes, trois assaillants sont mort lundi. Mais le sort des autres membres du groupe restait inconnu tôt mardi matin.
Le carnage a été revendiqué par les insurgés islamistes somaliens shebab, qui disent agir en représailles de l’intervention militaire kényane en Somalie lancée fin 2011.
“Nous contrôlons le Westgate”, a déclaré peu avant minuit le ministère de l’Intérieur sur son compte Twitter.
“Nos forces passent au peigne fin un étage après l’autre, à la recherche des personnes qui auraient été oubliées”, a ajouté le ministère. “Nous pensons que tous les otages ont été libérés”.
Un peu plus tôt, le porte-parole du gouvernement, Manoah Esipisu, avait affirmé que les forces spéciales kényanes ne rencontraient plus aucune “résistance” dans le bâtiment.
Les forces de sécurité ont lancé plusieurs assauts pour tenter de venir à bout du commando.
Lundi à la mi-journée, un journaliste de l’AFP a entendu de fortes explosions et des “tirs nourris” dans le Westgate, avant que d’épais nuages de fumée noire ne s’en échappent.
Dans la journée, un membre des forces spéciales kényanes ayant participé aux combats a raconté la difficulté de l’intervention, parlant d’une partie de “cache-cache” avec les islamistes dans les magasins du vaste centre commercial, dont les alentours restaient bouclés et interdits d’accès aux journalistes.
Les assaillants “ont brûlé des matelas pour faire diversion, ils ont essayé de s’échapper”, a de son côté déclaré le chef de l’armée kényane, le général Julius Waweru Karangi.
Selon le ministère de l’Intérieur, plus de 10 suspects ont été arrêtés “pour interrogatoire”, sans plus de détail.
Samedi, au moment de l’attaque, ce centre commercial de luxe, détenu en partie par des Israéliens, était bondé de Kényans et d’expatriés.
Selon une source sécuritaire, des agents israéliens sont intervenus aux côtés des forces kényanes pour tenter de secourir les personnes encore prises au piège. Dimanche en fin de journée, le président kényan Uhuru Kenyatta avait aussi indiqué avoir reçu des offres d’aide de plusieurs “pays amis”, tout en assurant que l’opération restait pour l’instant une “opération kényane”.
Plusieurs étrangers, dont deux Françaises, six Britanniques, un Sud-Africain, une Sud-Coréenne, une Néerlandaise, un Péruvien, deux Indiens et deux Canadiens ont été tués dans l’attaque, ainsi qu’un célèbre poète et homme d’État ghanéen, Kofi Awoonor.
Le commando islamiste a pénétré samedi à la mi-journée dans le centre commercial, ouvrant le feu à l’arme automatique et lançant des grenades sur les clients et les employés du centre. Des heures durant, les rescapés ont émergé au compte-gouttes du bâtiment, au fur et à mesure de la lente progression des forces de l’ordre.
Il s’agit de l’attentat le plus meurtrier à Nairobi depuis une attaque suicide d’Al-Qaïda en août 1998 contre l’ambassade des États-Unis, qui avait fait plus de 200 morts.
Des intérêts israéliens au Kenya ont déjà été la cible d’attaques revendiquées par Al-Qaïda: en 2002, un attentat suicide contre un hôtel fréquenté par des touristes israéliens avait tué 12 Kényans et trois Israéliens près de la ville côtière de Mombasa. Presque simultanément, un avion de la compagnie israélienne El Al avec 261 passagers à bord avait échappé de peu aux tirs de deux missiles à son décollage, également à Mombasa.
Selon des témoins, les agresseurs ont “tiré dans le tas” samedi à Westgate. D’après un employé du centre commercial, Titus Alede, “ils ont dit +vous avez tué notre peuple en Somalie, c’est à votre tour de payer+”.
Dans une capitale connue comme le “hub” de l’Afrique de l’Est, où vivent de nombreux expatriés rayonnant dans toute la région, le Westgate était régulièrement cité par les sociétés de sécurité comme une cible possible de groupes liés à Al-Qaïda comme les shebab. Ouvert en 2007, le bâtiment compte restaurants, cafés, banques, un grand supermarché et un cinéma multiplexe qui attirent des milliers de personnes chaque jour.
Le président américain Barack Obama a déploré lundi “une terrible tragédie” et offert son aide au Kenya.
La classe politique kényane a elle appelé à l’unité face à la crise.
Et le vice-président William Ruto a obtenu de la Cour pénale internationale de pouvoir rentrer dans son pays pour gérer la situation. M. Ruto comparaît depuis le 10 septembre à La Haye pour son rôle présumé dans les violences politico-ethniques qui avaient suivi les élections kényanes de fin 2007 et avaient fait plus de 1.000 morts.
Source(s): dhnet.be le 24-09-2013 / -Meta TV)