Même les fuites à répétition d’Edward Snowden, en 2013, n’avaient pas fait de tels dégâts. Depuis plus d’un an, la puissante Agence de sécurité nationale (NSA) est secouée par un “tremblement de terre”,affirme The New York Times dans un article particulièrement fouillé.

Habituée à mener des attaques informatiques à des fins d’espionnage ou de déstabilisation, la NSA a été elle-même “profondément infiltrée”. Depuis août 2016, un groupe de hackers nommé “The Shadow Brokers” s’est mis à divulguer des informations sur son arsenal de cyberarmes, qui ont “désormais été adoptées, de la Corée du Nord à la Russie, par des pirates et retournées contre les États-Unis et leurs alliés”.

Les responsables interrogés par le journal sont formels : ces fuites “sont catastrophiques pour la NSA, mettant en doute sa capacité à protéger de puissantes cyberarmes et sa valeur même pour la sécurité nationale”.

L’agence vue comme la meilleure du monde pour s’immiscer dans les réseaux informatiques de ses adversaires a échoué à protéger le sien.”

Quinze mois après le lancement d’une enquête menée par l’agence et le FBI, le mystère demeure. “Les responsables ne savent toujours pas si la NSA a été victime d’un piratage brillamment exécuté – dont la Russie serait l’auteur le plus probable –, d’une fuite en interne, ou des deux à la fois. Trois employés ont été arrêtés depuis 2015 pour avoir pris avec eux des documents classifiés mais on craint qu’un ou plusieurs coupables de fuites ne soient encore dans la place.”

Pendant ce temps, “des millions de personnes ont vu leur ordinateur bloqué par des logiciels exigeant une rançon en monnaie virtuelle pour restaurer l’accès. […] Les responsables américains ont dû expliquer à de proches alliés – et à des dirigeants d’entreprises américaines – que des cyberarmes développées à Fort Meade, dans le Maryland, avaient été utilisées contre eux.”

Chasse à la taupe

Au sein de l’agence, une atmosphère de soupçon et de chasse à la taupe a fait plonger le moral des employés, indique The New York Times. Une bonne partie de l’arsenal de la NSA a aussi dû être remplacée.

Les fuites organisées par les Shadow Brokers – qui se permettent régulièrement de narguer l’agence américaine dans un anglais approximatif sur les réseaux sociaux – auront à coup sûr des répercussions pour la NSA. D’anciens responsables estiment que l’agence a trop mis l’accent ces dernières années sur le développement d’armes offensives et d’outils de piratage et négligé l’aspect défensif.

L’administration Trump a fait savoir qu’elle annoncerait bientôt des modifications dans le fonctionnement de l’agence, pour le rendre plus transparent – et limiter ainsi l’impact de futures fuites.