En votant le principe de l’ISDS (procédure judiciaire contre les États), le Parlement européen anticipe le TAFTA

Nous avons tout à gagner à aller vite. 

Sinon, nous savons bien qu’il y aura une accumulation de peurs, de menaces, de crispations. (François Hollande, 11/02/2014)

 

Remodelage de dernière minute dans les règlements européens : des textes réglementaires concernant les traités internationaux sont amendés à l'heure des négociations sur le futur traité transatlantique. D'autres sont votés pour anticiper les modifications majeures que va apporter le GMT.

 

Tripatouillage du règlement sur les accords internationaux

On sait que le Parlement dispose d'un droit de veto dit "procédure d'approbation" sur l'adoption par le Conseil de l'Union européenne des textes dits "importants". Ainsi, le 16 avril, le Parlement a-t-il amendé l'article 90 du règlement du Parlement européen sur les accords internationaux.
 
Par exemple, l'amendement 2 de l'article 90 – paragraphe 5 était initialement : 
 
– 5.   À l'issue des négociations, mais avant la signature de tout accord, le projet d'accord est soumis au Parlement, pour avis ou pour approbation. Pour la procédure de l'approbation, l'article 81 est d'application.
Il est remplacé par :
 
– 5.   Lorsque le Conseil sollicite l'approbation ou l'avis du Parlement, sa demande est renvoyée par le Président à la commission compétente pour examen, conformément à l'article 81 ou à l'article 43, paragraphe 1.
 
Cette modification semble ainsi faire disparaître le renvoi automatique au Parlement européen, au bénéfice du passage dans une commission compétente. A priori il est difficile de commenter cette modification qui apparaît comme une complication du texte existant.
 
 
 
 

Principe de l'ISDS

Par ailleurs, le même jour 16 avril, 535 sur 766 Eurodéputés(230 PPE, 72 ADLE, 155 Socialistes et Démocrates) le principe de l’ISDS a été adopté. Cette clause entre dans le cadre de la mise en place de procédures juridiques permettant aux multinationales, en outre, d’attaquer les États lorsque des changements législatifs pénalisent leurs activités économiques. C'est l'ouverture vers l'une des dispositions les plus contestées du futur traité.
 
Qui paye les tribunaux d'arbitrages
 
Pawel Zalewski (PPE) A7-0124/2013 Législatif 1ère lecture
 
Plusieurs accords internationaux auxquels participent l’UE prévoit en matière d’investissements étrangers directs la possibilité pour un investisseur de déposer une réclamation contre un État. Dans l’hypothèse d’un tel différend, l’État membre concerné devra supporter des coûts (frais destinés ;à couvrir la gestion du différend, le paiement des arbitres ou encore la rémunération des avocats) et peut, s’il perd, être tenu de verser une indemnisation. Le texte proposé vise à établir la responsabilité financière dans les cas concernant l'Union. La commission devrait plutôt arrêter toutes les  négociations de traités impliquant le recours à de tels tribunaux d’arbitrages. Il n’y aurait ainsi plus de problème de coûts.  Le système de règlement des différends est profondément injuste et sert uniquement les intérêts des firmes multinationales dans leur combat pour briser les normes sociales et environnementales. Je vote contre ce texte.
 
Pour l'eurodéputée (PS) Françoise Castex (non reconduite, opposée au TAFTA), interrogée par Sébastien Rochat, cette disposition, qui n'est qu'une étape en première lecture en vue de préparer une directive, entre très clairement dans le cadre de la préparation du TAFTA. L'opacité du texte, rédigé ici par la "commission du commerce international", fait que, selon F. Castex, "tout le monde a pensé que c'était juste un texte technique". Ce texte n'a en effet même pas été examiné par la "commission des affaires juridiques" ! L'eurodéputée nous montre ainsi clairement que les députés européens ne savent pas forcément ce qu'ils votent, car ils n'ont pas à se prononcer sur la politique, mais sur la technique.
 
Selon Ludovic Lamant, la signature d'accords commerciaux qui incluent ISDS est déjà une pratique courante. Mais à cause du texte présenté le 16 avril en première lecture, l'Union européenne obtiendra une compétence sur la clause ISDS et pourra ainsi engager les 28. Alors qu'auparavant ce genre de disposition devait se prendre état par état, c'est-à-dire sous contrôle démocratique. On voit donc bien ici la menace que représente l'Union européenne contre la démocratie et contre l'état de droit. La directive devra être prête pour la signature du traité de libre-échange avec le Canada, dans quelques mois. 
 
 
 
Les États-Unis et la Commission Européenne ont pour but de renforcer le pouvoir des entreprises transnationales afin que celles-ci puissent contester en justice les réglementations ayant cours dans un pays si elles nuisent à leurs profits.
 
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Voir aussi : 
 
– Ludovic Lamant, Le piège caché de l'accord de libre-échange Europe États-Unis, 01/05/2014 [Il s'agit d'un historique très fouillé de la mise en oeuvre des principes de l'ISDS].
 
– Sébastien Rochat, Comment le Parlement européen, en douce, a anticipé TAFTA (Arrêt sur images), 22/05/2014.

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Source(s) : Le blog de XipeTotec / Par XIPETOTEC, le 22.05.2014 / Fawkes News

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