A Nice, un citoyen peut devenir une caméra de surveillance

Grâce à une application venue d'Israël, 2 000 personnes pourront filmer pendant deux mois les incivilités dont ils sont témoins, dans une ville déjà surarmée de caméras de surveillance.

De la vidéosurveillance, en veux-tu en voilà. La ville de Nice, déjà surveillée par 1 950 caméras, soit 27 au km2, va désormais être arpentée par des citoyens eux-mêmes équipés. Une application, Reporty, leur permet, depuis ce lundi, de filmer lorsqu'ils sont témoins d'une incivilité et de transmettre leur œuvre en direct au centre de vidéosurveillance de la police municipale.

«Vous êtes témoin d'une incivilité (nuisance sonore, tag, dépôt sauvage…) ou d'une situation critique (vol, agression, incendie, inondation…) par une simple pression sur le téléphone, l'application renvoie au Centre de supervision urbain la en direct de l'incident en haute qualité», explique un communiqué du maire de Nice. En appelant, la personne est géolocalisée, précise son cabinet, contacté par Libération. Ainsi, les caméras de vidéosurveillance peuvent cibler la zone concernée (pour le dire autrement : les caméras de la ville filment l'endroit où un citoyen filme) et une patrouille peut être dépêchée sur place.

«Pour l'instant, nous avons un panel de 2 000 citoyens. Il est composé de 1 000 agents de la ville de Nice et de la métropole, de membres de la réserve civile et citoyenne, de comités de quartiers et du groupe “voisins vigilants” [des habitants qui, par secteur, assurent une surveillance passive, NDLR]», explique-t-on à la mairie. Au bout de deux mois, si l'utilisation de l'application est jugée positive, elle sera généralisée à l'ensemble des habitants. Tout juste faudra-t-il remplir un formulaire de demande.

«Face aux défis que nous avons à relever, chacun d'entre nous doit devenir un citoyen engagé, acteur de sa propre sécurité et donc de la sécurité collective. Et lorsque les nouvelles technologies peuvent y contribuer, en rendant aujourd'hui possible ce qui, hier, relevait de la science-fiction, pourquoi s'en priver !» s'enthousiasme . L'opposition socialiste, de son côté, est plus sceptique. Elle dénonce «une démarche contestable sur le fond et inadmissible sur la forme […] qui ressemble à l'organisation d'un processus de délation généralisé». «On voit que le maire de la ville [de Nice, ] ne se gêne pas d'expliquer à quel point c'est utile pour instaurer la délation dans toute la ville», a également jugé Benjamin Sonntag, cofondateur de l'association La Quadrature du Net, interrogé sur France Info. 

Le modèle israélien

Comme souvent en matière de sécurité, le maire de Nice, qui visiblement ne s'embarrasse pas de ces questionnements éthiques, est allé chercher cette application en Israël. Elle a été développée par la start-up de l'ancien Premier ministre Ehud Barak. «Le contact a été pris lors d'une visite de Christian Estrosi en Israël», explique-t-on à la mairie. Le voyage, organisé en décembre, avait fait grincer des dents, celui qui était alors président de la région PACA, ayant annoncé, avant son départ, un don de 50 000 euros au Fonds national juif, aux frais de la collectivité.

En février 2016, déjà, il avait fait un déplacement en Israël et rencontré le PDG de la société de sécurité Eagle Security and Defense, par ailleurs ex-directeur du Conseil de sécurité national israélien, selon l'Express. Quelques mois plus tard, en septembre, il annonçait qu'un «bureau de sécurité israélien» étudiait des aménagements visant à renforcer la sécurité de la ville, et notamment de la promenade des Anglais. L'idée d'une association des citoyens dans le domaine de la sécurité avait, semble-t-il, déjà germé. «Nous sommes confrontés à une guerre qui nous est faite à l'israélienne, et ne pas mener nous-mêmes cette guerre à l'israélienne, c'est-à-dire nous appuyer à la fois sur toutes les administrations, toutes les collectivités, et aussi les populations – car en Israël les populations, par des campagnes d'information et de communication, sont associées –, c'est une erreur», assurait le maire de Nice.

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Voir aussi : Clash entre Estrosi et Valls : le Premier ministre réagit à une question sur le conflit israélo-palestinien

 

Sources : Libération / BFMTVKhalid Ibn Walid /

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