Le 16 septembre, en votant dans le cadre de la loi antiterroriste une mesure exceptionnelle d’interdiction administrative de sortie du territoire pour tout candidat français présumé jihadiste, les députés français ont reconnu implicitement, sinon officiellement, que la France était désormais un pays en état de guerre.
Cette interdiction exceptionnelle visant une certaine catégorie de ressortissants nationaux vaudra pour une période de six mois renouvelable jusqu’à deux ans, sans qu’aucun recours en justice ne soit possible pour contester la décision, l’interdiction relevant d’une décision administrative et non judiciaire.
Sans craindre le ridicule, le député Pietrasanta (PS), rapporteur du texte, affirme vouloir « protéger contre eux-mêmes » des jeunes, notamment des filles, encore peu radicalisés et qui risquent de le devenir en se rendant dans les zones de lutte armée.
On remarquera en passant que la loi en question ne parle pas du tout de “protéger contre eux-mêmes” les jeunes Français rejoignant l’armée israélienne Tsahal pour bombarder et massacrer les civils de Gaza. Ce qui renforce son caractère d’exception.
« Nous sommes en guerre »
L’expression qui revenait en boucle dans les travées du Parlement lors des discussions du 16 septembre étaient toujours la même, tant sur les bancs socialistes que chez les radicaux ou les députés UMP : « Nous sommes en guerre ! » Avec toutes les conséquences que cela impliquait :
« Nous avons su, dans notre histoire, suspendre à un moment donné les libertés démocratiques. Celles-ci, en effet, ne peuvent pas avoir le même contenu en temps de paix et en temps de guerre. Or la guerre nous a été déclarée » (Alain Touret, député Parti radical de gauche).
En réalité, voilà déjà quelques temps que la France intervient directement aux quatre coins de la planète, toujours au côté de l’OTAN et en forçant un peu la main de l’ONU à l’occasion : Libye, Afghanistan, Mali… Et désormais l’Irak où nos fiers mais dédaignés avions Rafale viennent de porter leurs premières attaques.
Ce qui nous valut illico une pub hallucinante, relevée par Pascal Riché sur Rue89, produite par les services de communication de l’armée, avec musique électro, sceau de l’État major des armées et logo de la Marine nationale à l’appui :
Le Rafale frappe en Irak (document : Theatrum Belli)
Le chaos au bout du fusil
Les raisons invoquées pour les interventions sont rituellement les mêmes : voler au secours d’innocentes victimes civiles, terrasser l’ennemi terroriste et instaurer la sacro-sainte démocratie. Palme de l’hypocrisie nounouille au président Hollande qui déclare vouloir frapper militairement l’Irak « pour contribuer à la paix » (conférence de presse du jeudi 18 septembre).
Le problème, c’est que toutes ces interventions guerrières ont partout abouti aux résultats exactement inverses de ceux recherchés : multiplication des victimes civiles, renforcement des effectifs et des positions de l’ennemi “terroriste” avec la création officielle d’un État islamique (EI), chaos généralisé sur absolument TOUS les foyers de conflits.
Nos croisés ne se retrouvent-ils pas à combattre, comme en Syrie, ceux-là mêmes qu’ils armaient il y a encore quelques semaines ? Ne les voit-on pas aujourd’hui préférer garder les aspirants jihadistes entre leurs murs en leur interdisant de sortir du territoire (nul doute que les fous furieux de l’EI sauront rapidement en tirer avantage) ?
Et pas une seconde, pas une seule fois, ne s’est posée la question de s’attaquer aux véritables sources du mal, c’est-à-dire à ceux qui financent et arment sans vergogne les fous de Dieu où qu’ils soient (Qatar, Arabie saoudite…). Mieux, c’est à ceux-là qu’on dresse des ponts en or pour de troubles motifs (hého, les gars, regardez notre pub pour le Rafale !). Confusion et cynisme sont à leur comble. __________________________________________________________
Source(s) : la suite sur politis.fr Par Le Yéti – 22 septembre 2014