Patrick Buisson a bien enregistré Nicolas Sarkozy à son insu

La Sarkozye ne voulait pas y croire. C’est pourtant vrai : Patrick Buisson enregistrait bien Nicolas Sarkozy à son insu, lors de réunions privées à l’Elysée pendant le précédent quinquennat.

Dans son édition datée de mercredi 5 mars, Le Canard Enchaîné publie ce qu’il présente comme le verbatim d’une réunion à l’Elysée, enregistrée à l’aide d’un dictaphone par l’ancien conseiller de M. Sarkozy. Selon le journal satirique, la scène se déroule le 27 février 2011, lors d’une réunion de travail autour de l’ancien président, à quelques heures du remaniement qu’il va annoncer.

Outre Nicolas Sarkozy et Patrick Buisson, le secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant, le conseiller spécial Henri Guaino, le conseiller en communication Franck Louvrier, le publicitaire Jean-Michel Goudard et le sondeur Pierre Giacometti sont présents. D’après la retranscription de l’hebdomadaire, les six hommes et l’ex-chef de l’Etat échangent notamment sur l’allocution que va prononcer M. Sarkozy pour annoncer le remaniement ministériel.

« VOUS N’AVEZ PAS D’ÉTATS D’ÂME SUR BRICE ? »

Un appareil enregistreur tourne, selon « Le Canard », qui retrace dès lors le déroulé de deux heures et demi de discussions à l’Elysée, entre l’arrivée au Palais de Patrick Buisson et son retour à son domicile.

Lors de cette réunion privée, Nicolas Sarkozy lance par exemple « à la cantonade » : « Vous n’avez pas d’états d’âme sur Brice ? » Brice Hortefeux, alors ministre de l’intérieur, est en effet en passe d’être évincé du gouvernement. Réponse de Patrick Buisson : « On en a tous. On aime tous Brice. Le problème est de faire un choix politique. » Réplique de Nicolas Sarkozy : « Brice dit que le sentiment d’insécurité a régressé. Toutes les études montrent que ce n’est pas vrai. »

Patrick Buisson, qui a inspiré la stratégie de droitisation de Nicolas Sarkozy pendant la campagne présidentielle de 2012, poursuit : « En matière d’immigration, Brice est inhibé. Une partie de notre électorat manifeste une certaine impatience. » A l’issue de la réunion, M. Buisson se moque aussi des anciens ministres Roselyne Bachelot, Michèle Alliot-Marie ou Xavier Darcos, qu’il juge « archinuls ».

« JE CONFIRME »

Contacté par Le Monde, Patrick Buisson s’est refusé à tout commentaire. De son côté, son avocat a confirmé mardi soir l’authenticité de l’enregistrement de la réunion de travail retranscrite par « Le Canard ». « Je confirme qu’il s’agit d’un enregistrement authentique et que c’est bien mon client Patrick Buisson qui a procédé à cet enregistrement », a admis Me Gilles-William Goldnadel dans une déclaration à Reuters.

L’ancien conseiller de l’Elysée venu de l’extrême droite avait pourtant nié en bloc les accusations publiées par Le Point, le 12 février, révélant l’existence de ces enregistrements pirates. L’hebdomadaire avait affirmé que M. Buisson avait enregistré « des heures et des heures de réunions stratégiques » concernant notamment la campagne présidentielle de 2012.

Il aurait fait de tels enregistrements « à plusieurs reprises » durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy et « à l’aide d’un dictaphone dissimulé dans sa veste », écrivait l’hebdomadaire. Patrick Buisson avait alors annoncé son intention de déposer une plainte pour diffamation contre Le Point.

SARKOZY « SE SENT TRAHI »

Dans la foulée du verbatim publié par Le Canard enchaîné, le site d’information Atlantico a mis en ligne des extraits d’un autre enregistrement réalisé par M. Buisson. On y entend l’ancien patron du journal d’extrême droite Minute tenir des propos peu amènes à l’égard de Carla Bruni-Sarkozy, en privé, à l’issue d’une réunion à l’Elysée, datée du 26 février 2011. Soit la veille de la réunion évoquée par « Le Canard ».

Nicolas Sarkozy le 17 avril 2012. AFP - LIONEL BONAVENTURE
Nicolas Sarkozy le 17 avril 2012. AFP – LIONEL BONAVENTURE

Inquiet au sujet de la plainte d’Anticor dans l’affaire des sondages de l’Elysée, où son nom est cité, Patrick Buisson s’interroge également auprès d’un autre conseiller sur la capacité du nouveau secrétaire général de l’Elysée, Xavier Musca, à savoir « se mouiller » autant que Claude Guéant pour les « affaires du Parquet ».

Suite à ces révélations, Nicolas Sarkozy est « furieux » d’avoir été espionné par celui qui a fait partie de son premier cercle, selon son entourage. « Il se sent trahi » par son ancien conseiller, qu’il a continué à consulter depuis son départ de l’Elysée, précise-t-on. La dernière fois que les deux hommes se sont entretenus, c’était le 11 février, juste après les révélations du Point. Ce jour-là, M. Buisson a osé démentir devant l’ex-président les affirmations de l’hebdomadaire.

SILENCE DANS LES TROUPES

Pour les sarkozystes, pas question pour autant de surréagir à la polémique : l’ancien chef de l’Etat a donné consigne à ses troupes de se taire pour ne pas donner trop d’échos à cette histoire peu reluisante. Son fidèle Brice Hortefeux a montré l’exemple. Assurant qu’il ne souhaitait pas « alimenter des polémiques inutiles », l’ex-ministre a cité Confucius, mardi soir, sur iTélé : « le silence est un véritable ami car lui, ne trahit jamais ».

Pour M. Sarkozy, pas question non plus de couper les ponts avec Patrick Buisson de manière spectaculaire : aucune prise de parole ou dépôt de plainte de M. Sarkozy ne sont prévus. L’idée est de faire le dos rond, en espérant que cela passe… « Il apparait comme une victime dans cette affaire car il a été trahi », veut croire un de ses soutiens.

« PERSONNE NE SAIT JUSQU’OÙ ÇA PEUT ALLER »

Dans l’entourage de Nicolas Sarkozy, où l’on affirme que l’ex-président n’a jamais su qu’il était enregistré à son insu, c’est la stupéfaction. « C’est consternant »,juge l’un d’eux. « C’est hallucinant. Jamais je n’aurais imaginé cela », confie un autre, déboussolé par les révélations de la presse. « Moi, cela ne m’étonne pas. Buisson est un dingue et a agi comme un historien en voulant garder des archives », pense un autre à propos du patron de la chaîne Histoire.

Après les premières révélations du Point, certains soutiens de l’ex-président ne voulaient pas croire que Patrick Buisson pouvait être capable de tels agissements.« C’est totalement invraisemblable. Sinon, on se serait aperçu de quelque chose », jurait alors un ancien conseiller de Nicolas Sarkozy. La vérité éclate désormais au grand jour.

Un grand déballage n’est pas à exclure. Mardi soir, l’avocat de M. Buisson a affirmé sur iTélé que son client lui avait confié qu’il n’avait « rien d’un Bérégovoy »et qu’il rendrait « coup pour coup ». Un sarkozyste redoute que l’affaire donne lieu à un feuilleton, alimenté par des révélations potentiellement dévastatrices pour son candidat : « Le problème, c’est que personne ne sait jusqu’où cela peut aller maintenant que la boîte de Pandore est ouverte… »

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Source: Le Monde (par Alexandre Lemarié)

Ci-dessous, les retranscriptions de 4 enregistrements publiés par le site Atlantico
Enregistrements de Sarkozy par Buisson, 1er extrait : Guéant, Musca, Mercier et les interventions sur les juges

26 février 2011. Sur le perron de la résidence de la Lanterne, Nicolas et Carla Sarkozy saluent plusieurs conseillers du président qui viennent d’assister à une réunion stratégique pour la suite du quinquennat. Parmi ces conseillers se trouve Patrick Buisson… qui a tout enregistré. Y compris la conversation qu’il va avoir avec Jean-Michel Goudard, conseiller en communication et publicitaire, dans la voiture qui les ramène de Versailles.​
 

Les printemps arabes rythment l’actualité depuis plusieurs semaines. Le président doit s’exprimer le lendemain, dimanche 27 février à 20h00, dans une allocution dédiée à ces bouleversements. En arrière-plan, un remaniement ministériel. Michèle Alliot Marie est fragilisée depuis les révélations de son déplacement privé en Tunisie à l’hiver 2010. Voyage au cours duquel elle aura bien eu un contact téléphonique avec le Président Ben Ali, malgré ses précédents démentis.  De son côté, Brice Hortefeux a été condamné quelques mois plus tôt pour injure raciale. Interpelé par une militante qui venait lui présenter un jeune homme en tentant un «C’est notre… c’est notre petit arabe », le ministre a répondu « Il en faut toujours un. Quand il y en a un ça va. C’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes. »

Les différents conseillers présents s’assurent alors que cette réunion scelle leur sort : il est décidé qu’Alain Juppé et Claude Guéant les remplaceront.

Dans la voiture à bord de laquelle ils quittent ensemble la résidence de la Lanterne, Patrick Buisson et Jean-Michel Goudard reviennent sur plusieurs points évoqués lors de la matinée. Ils évoquent également certaines « affaires auprès du Parquet » et la façon dont Claude Guéant, secrétaire général de l’Elysée, se serait « mouillé ». Parmi ces « affaires », il y a la plainte déposée par l’association Anticor dans l’affaire dite des sondages de l’Elysée qui concerne directement Patrick Buisson.

Ironie du sort ou cynisme noir, la dénonciation d’une justice politique agissant sous l’impulsion directe de Christiane Taubira avait été la ligne de défense alors choisie par Patrick Buisson et Me Gilles-William Goldnadel.

Le 13 novembre 2013, Patrick Buisson avait porté plainte contre la garde des sceaux pour “prise illégale d’intérêt”. Une plainte jugée recevable par la cour d’appel, ce qui entraine la nomination d’un juge d’instruction et la convocation probable de la ministre de la Justice.

Verbatim

NICOLAS SARKOZY : Mais on est mieux ici pour, Carla et moi là, ce week-end, tranquilles.

CARLA SARKOZY : Salut… Au revoir Patrick

PATRICK BUISSON : (l’embrassant) je brave l’interdit !

NICOLAS SARKOZY : Oh mais non !

NICOLAS SARKOZY  ferme la porte.

NICOLAS SARKOZY : Si Brice vous appelle… dites-lui… (BRUIT)…

PATRICK BUISSON (dans la cour) : lever de rideau ; le prologue. Ok c’est bon, je rentre avec Jean Mi.

FRANCK LOUVRIER : Salut !

DANS LA VOITURE : PATRICK BUISSON et JEAN-MICHEL GOUDARD

PATRICK BUISSON : C’est dur hein ?

JEAN-MICHEL GOUDARD : Hein ?

PATRICK BUISSON : C’est dur !

PATRICK BUISSON : Non, non… Sa présence…

JEAN-MICHEL GOUDARD : De venir ici ?

PATRICK BUISSON  (chuchotant) : de Carla…

JEAN-MICHEL GOUDARD : Ahhh t’es amusant. Si je la connaissais pas un peu mieux depuis la télé j’aurais trouvé ça….lamentable….interventions percutantes quand même hein…

PATRICK BUISSON : Oui…

PATRICK BUISSON : Elles sont ou les caméras (sortie) …y a des caméras en face… Oh…

JEAN-MICHEL GOUDARD (au téléphone) :  Oui, alors, je sors de la réunion, je serai là dans un quart d’heure à peu près. Voilà…

PATRICK BUISSON : Qui soutient-on derrière Guéant ? Il y en a un que je veux voir promu c’est Camille Pascal.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Oui bah c’est fait hein…il va rentrer dans le… c’est Xavier qui le remplace.

PATRICK BUISSON : Ah bon, c’est pas Castex ? C’est Musca ?

JEAN-MICHEL GOUDARD : Non non, c’est Xavier [Musca]. Castex il est tout neuf-là. Non non Xavier il est parfait

PATRICK BUISSON : Musca il est vraiment mono produit. Il est économie économie.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Oui mais heuuuu, il est bien.

PATRICK BUISSON : Tu as quels rapports avec lui ?

JEAN-MICHEL GOUDARD :Très cultivé… Excellents rapports avec lui, humour, la distance, le culot de temps en temps de dire des choses que le président n’a pas envie d’entendre. Pour un an il est parfait.

PATRICK BUISSON : Ouais. Parce que tu vois l’avantage de Guéant, la  depuis 3 mois, c’est qu’il connaissait un petit peu les dossiers, notamment pour les affaires auprès du parquet. Il se mouillait un petit peu.  Il va falloir expliquer tout ça à Musca, et vite hein parce que…

JEAN-MICHEL GOUDARD : Ouais à moins que tu ne continues avec Claude ?

PATRICK BUISSON : Ouais. Ouais. Ouais. Ouais.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Ben ça l’intéresse quand même directement parce que… l’Elysée c’était lui à cette époque-là.

PATRICK BUISSON : Ouais, ouais. Oui mais est-ce qu’il a, en tant que ministre de l’intérieur, autorité à parler au parquet ? C’est plus facile quand t’es secrétaire général de l’Elysée que ministre de l’intérieur.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Alors c’est Castex. Enfin le secrétaire général c’est Xavier, et Castex c’est son domaine. Tu le connais bien Castex ?

PATRICK BUISSON : Non. Pas du tout.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Il est très sympa.

PATRICK BUISSON. Mais c’est les affaires sociales son domaine à Castex ?

JEAN-MICHEL GOUDARD : Ah non je suis bête, attends une seconde, non, non, non, oui je confonds excuse-moi, non c’est …. Excuse-moi.

PATRICK BUISSON : Il est con, il est con.

(SIRENE DE POLICE)

PATRICK BUISSON : Bon… j’ai pas réussi à entrainer la tête de Mercier…

JEAN-MICHEL GOUDARD : Non. C’est logique ce qu’il a dit. C’était euh… On a l’impression qu’il y a une raison forte pour enlever Brice. C’est les résultats…

PATRICK BUISSON : Bon je sais pas avec qui, c’est avec toi que j’ai discuté de Mercier … Pourquoi on s’arrêtait.

JEAN-MICHEL GOUDARD : oui. Je sais mais en fait euh il faut qu’il soit indiscutable et là les….

JEAN-MICHEL GOUDARD : Mercier. Oui pourquoi ? Parce qu’il est trop gentil avec les magistrats ?

PATRICK BUISSON : Non, mais il est totalement calamiteux

JEAN-MICHEL GOUDARD : oui mais il y a plus calamiteux que lui encore.

PATRICK BUISSON : Oui qui ?

JEAN-MICHEL GOUDARD : Il y a Bachelot

PATRICK BUISSON : Oui mais elle arrive à construire des phrases et elle articule

JEAN-MICHEL GOUDARD : Oui mais elle dit que des conneries

PATRICK BUISSON : Oui mais on peut pas tout avoir.

JEAN-MICHEL GOUDARD : J’ai Morano qui m’a appelé hier.

PATRICK BUISSON : Ah moi aussi, mais je l’ai pas prise. Pour savoir s’il y avait un remaniement.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Oui

PATRICK BUISSON : pour voir s’il n’y avait pas quelque chose à gratter

JEAN-MICHEL GOUDARD : Ouais. Elle n’aime pas Fillon hein ? Tu savais ça ?

PATRICK BUISSON : Non.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Et elle déteste Bachelot.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Moi je l’aime bien. Morano.

PATRICK BUISSON : Elle est marrante.

Enregistrements de Sarkozy par Buisson, 2e extrait : Nicolas, Carla, l’immobilier, leurs finances et leurs amours​

Lors de la réunion du 26 février 2011 à la Lanterne, enregistrée par Patrick Buisson, il a notamment été question du départ de Brice Hortefeux du ministère de l’Intérieur et des difficultés que ce dernier allait rencontrer pour se trouver un nouveau logement. Suit cet échange entre Nicolas et Carla Sarkozy.

Verbatim

NICOLAS SARKOZY : Quand j’étais ministre du Budget et que j’invitais monsieur Le Noyer à Bercy… J’étais dans un appartement en location rue Pierre Charon. J’ai payé, parce qu’à un moment tu payes plus rien !

CARLA BRUNI SARKOZY : J’ai toujours pensé qu’il fallait garder…

FRANCK LOUVRIER : Je suis tout à fait d’accord…

NICOLAS SARKOZY : Et nous nous avons une maison en location alors qu’on a trois appartements de fonction.

CARLA BRUNI SARKOZY : Ah oui mais ça c’est parce que je t’entretiens.

(RIRES)

CARLA BRUNI SARKOZY : Et je pensais que j’épousais un mec avec un salaire et … Brouhaha… J’avais des contrats mirifiques et plus rien…A la la la la la…heureusement que après….

NICOLAS SARKOZY : Voilà que je deviens riche en me mariant.

CARLA BRUNI SARKOZY : Après moi je vais les re-signer les contrats. Je vais même pas attendre tellement longtemps… Si je peux me permettre… Un petit contrat à la cool comme ça… On ne va pas faire vendre de l’anti ride à une fille de de 22 ans, vous êtes d’accord ?

(RIRES)

CARLA BRUNI SARKOZY: Julia Roberts 44, Sharon Stone 52, Julianne Moore 53… Tout ça, ça a des contrats mirifiques hein ? Que je ne peux pas accepter pour l’instant…. Ça se fait pas.

NICOLAS SARKOZY : Oh… je vais te dire,  mon avenir c’est de devenir Monsieur Ramirez à la caisse.

(RIRES)

CARLA BRUNI SARKOZY : Non, juste que moi je puisse faire mon job, déjà comme ça… pour entretenir… très cher… je vais te dire je suis folle de lui… alors… on perd la tête hein… ?

Enregistrements de Sarkozy par Buisson, 3e extrait : “Y’en a qu’un qui pourrait remplacer Fillon, c’est Juppé”​

Le 26 février 2011, Nicolas Sarkozy discute avec ses conseillers du prochain maniement ministériel. Michèle Alliot-Marie, empêtrée dans ses affaires d’investissements en Tunisie et le proche du président de la république Brice Hortefeux vont notamment quitter le gouvernement. Pour Matignon, Nicolas Sarkozy ne semble pas envisager réellement de remplacer François Fillon.

Verbatim

NICOLAS SARKOZY : Remplacer Fillon par Borloo, c’est grotesque. Y’a qu’une seule personne qui pourrait remplacer Fillon aujourd’hui, c’est Juppé. Je m’entends très bien avec Alain. Je ne vous contredis pas. J’essaye de rebondir sur ce que vous dites les uns, les autres. Henri pose une question, donc je fais la jonction avec Jean-Michel et restons calme sur l’analyse quand même parce qu’il risque d’y avoir un décalage entre l’analyse stratosphérique et les décisions sérieuses, professionnelles (BRUIT) Même si Fillon n’est pas décevant, il est comme on le sait. Le fait qu’il disparaisse là, il va s’en prendre plein la gueule.

Sarkoleaks : les trois trahisons de Patrick Buisson (4e extrait)​

Première trahison

Comme le révélait Le Point il y a trois semaines – sans preuves à l’époque – , Patrick Buisson, longtemps décrit comme l’éminence grise de Nicolas Sarkozy, a donc bien enregistré, à leur insu, l’ancien président ainsi que ses conseillers à l’Elysée.

Pourquoi aucun doute n’est possible. Tout d’abord maître Gilles-William Goldnadel, l’avocat de Patrick Buisson a reconnu l’authenticité de l’enregistrement mentionné par le Canard Enchaîné le 4 mars. A l’écoute de celui qu’Atlantico s’est procuré, réalisé à un autre moment, on entend Patrick Buisson, seul, insérer un enregistreur dans la poche de sa veste puis rejoindre Nicolas Sarkozy et ses conseillers. L’enregistrement d’une durée de plusieurs heures comprend aussi bien les conversations de Patrick Buisson avec différents conseillers  qu’une réunion stratégique organisée le samedi 26 février 2011 à la Lanterne à Versailles. Il se conclut une fois que Patrick Buisson est à nouveau seul, après avoir salué la dernière personne avec laquelle il se trouvait.

Pourquoi il s’agit bien d’une trahison. Contrairement à ce qu’a tenté de laisser entendre l’avocat de Patrick Buisson après la publication de l’article du Canard Enchaîné, Nicolas Sarkozy n’était absolument pas informé des enregistrements pirates de son conseiller. Atlantico en a obtenu la confirmation auprès de différents membres de l’entourage de l’ancien président. Michel Gaudin en particulier, son actuel directeur de cabinet, nous l’a formellement confirmé et ne juge pas du tout crédible que ces bandes aient été des enregistrements de travail comme Patrick Buisson l’a soutenu au cours de la journée du 4 mars par la voix de son avocat.

Deuxième trahison

Plutôt que d’avoir confessé ces enregistrements pirates au moment des révélations du Point et d’avoir prévenu Nicolas Sarkozy du fait que certains n’étaient plus en sa possession, Patrick Buisson n’a retrouvé la mémoire qu’au fur et à mesure de la journée du 4 mars, au terme de laquelle il a fini par reconnaître « de très bonne grâce avoir utilisé un dictaphone » et plus grave, avoir malheureusement laissé traîner certains de ces enregistrements et s’en être, selon lui, fait dérober d’autres par une personne X.

Problème, selon des informations d’Atlantico, Patrick Buisson se serait en fait déjà ému dans le passé auprès de membres de son entourage professionnel du fait que des copies de ces enregistrements puissent être entre les mains d’un de ses familiers avec lequel il se trouve dans un conflit privé violent.

Pendant trois semaines, celui qui dénonçait « un mensonge total et ignominieux » et qui annonçait qu’il portait plainte pour diffamation contre Le Point a tout fait pour convaincre Nicolas Sarkozy et l’ensemble de ses interlocuteurs qu’il ne s’agissait que d’un complot politique.

Bon indicateur de cette volonté de dénégation absolue de l’ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, les « éléments de langage » très buissonniens repris dans le feuilleton épistolaire de Valeurs Actuelles qui dévoile chaque semaine les dessous de la vie politique. Dans l’article « Une ténébreuse affaire » signée de M. de Rastignac mais dont l’auteur est un proche de Patrick Buisson par ailleurs employé au Figaro sur les pages Figarovox, on lisait ainsi comment l‘entretien entre Nicolas Sarkozy et son ex-conseiller se serait déroulé à la veille des révélations du Point. « Les deux hommes évoquèrent rapidement ce qu’ils appelèrent ce “bruit de vespasiennes” pour s’entretenir ensuite de tout autres sujets. Comme pris en faute, Martial Kropoly (NDLR : Nicolas Sarkozy) expliqua pourquoi il avait choisi de se rendre à la réunion publique d’Eleonore de Conygham (NDLR : Nathalie Kosciusko-Morizet) : “j’ai fait tout cela par amitié” s’excusait-il. » Cerise sur le gâteau des éléments de langage buissonniens, à en croire Valeurs Actuelles, ce ne serait pas Nicolas Sarkozy qui aurait pris ses distances avec son ancienne éminence grise mais Patrick Buisson lui-même : « cette conversation était hantée par l’inquiétude qu’à l’ancien chef de l’Etat de perdre son conseiller. On sentait aussi dans l’atmosphère la lassitude du conseiller, adulé en campagne, oublié entre deux élections. »

Toujours selon « Mr de Rastignac »,  « le lendemain [des révélations du Point], après la parution du funeste écho les deux hommes se sont parlé sur l’étrange cornet. Les cornets furent froids et sévères. La malveillance était parvenue à son but. Le jeudi, alors que Martial Kropoly était parti en voyage au bout du monde, son directeur de cabinet appelait M. de Bièvres (NDLR : Patrick Buisson) pour l’assurer de la confiance et de l’amitié du “président”. Mais le conseiller ne dissimulait pas sa colère. “Vous direz à Martial Kropoly, a-t-il répondu, que je suis très choqué de son attitude” »

Selon les informations recueillies par Atlantico auprès de l’entourage de Nicolas Sarkozy, l’échange aurait effectivement été très très froid, l’ancien président ayant, lui, été extrêmement choqué par les révélations du Point.

Trois semaines plus tard, avec l’article du Canard Enchaîné et les bandes d’Atlantico, plus question de dénégation de la part de Patrick Buisson. Après plusieurs versions successives des arguments visant à défendre son client, Me Gilles-William Goldnadel en est venu à affirmer : « C’est bien lui qui a procédé mais il m’a expliqué que cela lui servait de notes. Ce n’était pas une fraude. (…) C’étaient des enregistrements de travail pour préparer les prochaines réunions. D’habitude, il les détruisait. Certaines ne l’ont pas été. Aujourd’hui, on en fait un usage malveillant. Ce n’est pas Patrick Buisson qui les a rendus public. Il n’en a pas fait le moindre usage… Il fera un communiqué pour le dire. Ce n’était pas dans un but pervers ou clandestin. D’ailleurs, il n’était pas le seul à user des enregistrements… » a indiqué l’avocat. Une dernière affirmation que rien n’étaye.

Selon le Point, l’ancien journaliste du périodique d’extrême droite Minute n’en serait pas à son coup d’essai. Patrick Buisson avait été soupçonné d’avoir fait installer des micros dans le bureau d’un des actionnaires du journal.

Troisième trahison

Outre le fait d’avoir enregistré Nicolas Sarkozy à son insu, la loyauté de Patrick Buisson envers l’ancien président est également mise à mal par le contenu même de ces enregistrements pirates. A plusieurs reprises et alors qu’il ne se trouve pas avec le président, Patrick Buisson échange avec d’autres interlocuteurs des propos peu respectueux sur Nicolas Sarkozy et son épouse.

Juste avant la fin de l’enregistrement, Patrick Buisson démontre par ailleurs l’estime dans laquelle il tient Nicolas Sarkozy en soulignant l’influence qu’il a sur le chef de l’Etat, notamment sur les questions d’immigration et d’intégration.

L’ancien journaliste de Minute et actuel président de la chaine Histoire, conclut par un rappel de son ADN politique profond… le royalisme.

Verbatim de l’extrait présenté dans cet article

JEAN-MICHEL GOUDARD : Sans nous, il ne le fait jamais. (NDLR : prendre des décisions)

PATRICK BUISSON : Jamais. Ça c’est sûr. Ça fait quand même trois quatre fois que je reviens à la charge depuis un mois…

JEAN-MICHEL GOUDARD : Ah ouais, ah ouais. Le grand moment, c’est il y a quatre ou cinq jours quand tu balances…

PATRICK BUISSON : … L’immigration.

JEAN-MICHEL GOUDARD : oui.

PATRICK BUISSON : Non mais attends, moi je ne suis pas du genre à subir et à attendre que les autres… Il était temps, il était temps.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Plutôt que de faire se demande Pierre (le sondeur Pierre Giacometti, NDLR), qui n’arrivait à rien… Trois heures pour discuter de la strat’… Là on a joué notre rôle vraiment, dans le style de Nicolas. C’est ce qui se passe dans les 8 jours. D’accord, mais il y a un vrai tournant politique.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Et quelque part on revient aux fondamentaux.

PATRICK BUISSON : Ah bah On revient aux fondamentaux. Pas quelque part. C’est pour ça qu’il ne faut pas qu’il émascule le propos sur les périls. Et l’autre la, le Pierre, dire « oui mais l’intégration »… c’est ça. Au moment où…

JEAN-MICHEL GOUDARD : Il est gentil euh Nicolas… Quand il a discours bouclé, il veut encore rajouter un truc qui rassemble, le rassemblement etc… entre toi et moi… ça n’a rien à foutre là..

PATRICK BUISSON : Mais rien à foutre, et l’intégration non plus. Au moment où il en arrive 500 000 de plus et on n’a pas intégré les six millions qu’on a.

JEAN-MICHEL GOUDARD : c’est un vrai euh…  Giscardien.

PATRICK BUISSON : Oui !

JEAN-MICHEL GOUDARD : c’est pas un gaulliste…ben toi t’es pas gaulliste non plus…t’es comme papa…

PATRICK BUISSON : Nooon…exagère pas …gaulliste c’est …le Général de Gaulle, c’est un général de guerre civile… Il a pas hésité à faire tirer…

JEAN-MICHEL GOUDARD : Mais est-ce que tu te sens gaulliste ? Non… Tu te sens ailleurs…

PATRICK BUISSON : Non c’est pas ma référence si tu veux mais en tout cas c’est un homme d’action et puis c’est un homme de décision.

JEAN-MICHEL GOUDARD : C’est quoi ta référence ?

PATRICK BUISSON : Ma référence ? Profondément ? Moi je suis le fils d’un camelot du roi. Je suis monarchiste, je suis royaliste.

JEAN-MICHEL GOUDARD : Enfin les rois…

PATRICK BUISSON : Oui mais d’accord…mais c’est ma culture, voilà.
 

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