Le titre donne d’emblée le ton du livre : il sera cash et sans complexe. “Antisémite” de Pascal Boniface, qui sort aux éditions Max Milo ce jeudi 11 janvier 2018, est un ovni. Il fera date. Jamais auparavant, un livre n’avait permis de dévoiler avec autant d’intelligence et sans complotisme (des faits, rien que des faits !) les rouages du “chantage à l’antisémitisme” utilisés trop souvent pour disqualifier toutes celles et tous ceux qui osent dénoncer l’occupation israélienne en Palestine.
15 ans après “Est-il permis de critiquer Israël ?”, Pascal Boniface frappe donc ici un grand coup.
Le directeur de l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) a décidé de tout dire. Voilà maintenant quinze ans que Pascal Boniface subit sans relâche les foudres du lobby pro-israélien qui l’accuse sans la moindre preuve d’être un antisémite.
“Pas une ligne, pas un mot, pas une phrase ne peuvent pourtant permettre de corroborer l’accusation d’antisémitisme. Aucune plainte pour ce motif devant aucun tribunal, alors que la législation française est certainement la plus sévère au monde”, écrit d’emblée l’auteur pour lever toute ambiguïté.
Ces accusations d’antisémitisme portées contre lui ont un point de départ.
En 2001, délégué aux affaires stratégiques au sein du parti socialiste, Boniface adresse à Henri Nallet, secrétaire international et à François Hollande, alors premier secrétaire du PS, une note qui décrit les ravages de l’occupation israélienne. La note dénonce également la timidité des socialistes à condamner le gouvernement (pourtant très à droite) d’Ariel Sharon et exhorte donc le parti à durcir sa position.
Les partisans acharnés de la défense d’Israël au sein du PS sont en colère. Pour discréditer l’auteur, ils travestissent ses mots. Ils font croire que Pascal Boniface aurait demandé dans sa note aux responsables socialistes de critiquer davantage Israël parce que le PS pourrait en tirer un bénéfice électoral du fait que les musulmans en France sont bien plus nombreux que les Juifs.
Pascal Boniface n’a jamais écrit cela. Il suffit de lire la note qui se trouve à la fin de l’ouvrage pour se rendre compte du mensonge. “Il serait donc préférable pour chacun de faire respecter des principes universels et non pas le poids de chaque communauté“, écrit au contraire Boniface.
Une simple vérification de la note aurait dû donc faire taire à jamais les accusations d’antisémitisme. Ça ne sera jamais le cas.
“Logiquement, le sujet aurait pu, aurait dû piquer la curiosité des journalistes et des universitaires (…). Si j’ai reçu de multiples messages de soutien, aucune enquête approfondie n’a été lancée“, confirme, atterré, dans son livre Pascal Boniface. La cabale est lancée. Elle ne s’arrêtera jamais.
“J’avais des fonctions extrêmement modestes, mais il fallait un exemple afin de dissuader toute tentative de suivre mon chemin. La même note ou le même article écrit par quelqu’un extérieur au PS n’aurait pas représenté le même enjeu”, écrit lucide Pascal Boniface qui précise encore : “jamais, je n’aurais imaginé l’impact que celle-ci [Ndlr: la note] aurait sur ma vie personnelle et professionnelle“.
Des menaces de mort vont être déposées dans sa boîte aux lettres. Certaines de ses conférences vont être annulées. Il sera aussi boycotté de plusieurs cérémonies, comme en novembre 2015, quand Mahmoud Abbas est fait citoyen d’honneur de la ville de Paris. Pascal Boniface sera enfin poussé à démissionner du PS.
Pour les soutiens indéfectibles d’Israël, il ne suffit pas de salir l’intellectuel, il faut également se débarrasser de l’Iris, son centre de recherche qu’il a créé en 1993.
En 2002, Roger Cukierman, alors président du CRIF, (Conseil représentatif des institutions juives de France) écrit aux ministres de la Défense et des Affaires étrangères pour qu’ils cessent leurs relations contractuelles et financières avec l’IRIS. “L’Iris a bien failli disparaître à ce moment”, se souvient Boniface.
L’Iris est aujourd’hui de nouveau menacé après que Manuel Valls, qui dénonçait pourtant il y a quelques années l’occupation israélienne (l’ancien Premier ministre avait également envoyé à Boniface une lettre de soutien en 2002), s’est vanté en novembre dernier d’avoir demandé aux ministères de l’Armée et des Affaires étrangères de cesser tout contact avec l’IRIS, du fait des positions personnelles de Boniface sur la question israélo-palestinienne.
200 pages plus loin et autant d’autres exemples affligeants de menaces, d’intimidations et de mensonges, émanant de personnalités pro-israéliennes (BHL, Frédéric Encel, Malek Boutih, Patrick Klugman, Frédéric Haziza, Manuel Valls donc, etc.), on ne peut saluer que la constance et la droiture de Pascal Boniface qui a toujours préféré argumenter avec des faits que de céder aux sirènes du complotisme.
“De vrais antisémites m’entouraient de leur sollicitude. Je leur faisais immédiatement comprendre que je ne partageais pas leurs vues et que je refusais tout amalgame”, rappelle dans son livre Boniface.
“Je pense que rien n’aurait fait davantage plaisir à certains de mes adversaires que je devienne antisémite. Qu’à force de prendre des coups de toutes parts et de façon injuste je surréagisse et me lance dans des déclarations incendiaires (…). Une telle dérive aurait justifié leurs accusations initiales et les aurait ravis. (…) Si je n’avais pas des convictions solides, si ma formation intellectuelle, lorsque ces attaques sont arrivées, n’avait pas déjà été assez consistante, si je n’avais pas été entouré d’amis sûrs et fidèles, si je n’avais pas reçu tant de témoignages de solidarité, de beaucoup de juifs français, si mon cercle familial proche n’avait pas été d’un soutien total, peut-être aurais-je dérivé”, explique encore Boniface dans son ouvrage.
Le témoignage de Pascal Boniface est essentiel parce qu’unique. Il s’appuie sur des faits précis et non sur des fantasmes. D’autres avant lui, comme l’auteur de ses lignes, ont dû faire face à ce “chantage à l’antisémitisme” juste pour avoir osé dénoncer l’occupation israélienne.
Dans une démocratie comme la nôtre, ces pratiques sont scandaleuses. Elles doivent cesser. Elles sont rendues possibles grâce à la passivité du milieu politique et médiatique dans son ensemble qui préfère regarder ailleurs…. Comment ont-ils pu laisser quelqu’un comme Pascal Boniface qui n’a jamais refusé le débat même avec “ses pires ennemis” et qui n’a jamais tenu un propos antisémite de sa vie, se faire salir de cette manière pendant 15 ans ?
Si cela est arrivé à Pascal Boniface, coupable de rien, cela arrivera à d’autres. Qui sera le prochain sur la liste ? Se fera-t-il lyncher de nouveau impunément ?
Nadir Dendoune
À lire absolument : “Antisémite”, de Pascal Boniface aux éditions Max Milo, disponible déjà en précommande. Sortie nationale le 11 janvier.
Source : Le Courrier de l’Atlas 5 janvier 2018