Par Servir le Peuple
Ce dimanche, François Hollande et son homologue allemand Joachim Gauck (président au rôle essentiellement honorifique, l'essentiel des pouvoirs appartenant à la chancelière Merkel) étaient réunis sur le site du "Vieil Armand" (Hartmannswillerkopf), sur l'ancienne "ligne bleue des Vosges", pour commémorer les premiers coups de la Grande Boucherie qui, en 4 ans, allait engloutir près de 10 millions de vies des cinq continents (voir ici – ici – ici et ici).
Cela a évidemment été l'occasion de célébrer, sur un ton larmoyant pitoyable, l'actuelle "amitié" entre les deux puissances impérialistes ennemies d'hier tout en "rendant hommage" au sacrifiés de l'infâme Moloch impérialiste ("Nos deux nations sont dans le même deuil") comme si celui-ci n'existait plus aujourd'hui (la véritable "religion civile" européenne actuelle), et de lancer les traditionnels appel à renforcer l'Europe ("aventure exceptionnelle […] parvenue à vaincre la guerre" et à "réunifier le continent dans la démocratie"… oui oui bien sûr, plus ou moins sur son sol, mais ailleurs ?) et à lutter pour "la paix dans le monde".
Des appels à la paix qui, concernant les deux pays ("que la volonté peut toujours triompher de la fatalité et que des peuples qui ont été regardés comme des ennemis héréditaires peuvent en quelques années se réconcilier"), sont bien sûr complètement ridicules : de 1910 à 1945, plus de trois décennies de tensions et de guerres ouvertes ont justement consisté consisté à "régler" la question de la surproduction absolue de capital en Europe et les violentes rivalités entre États qu'elle suscitait ; et la "solution" a finalement été trouvée par le capitalisme dans ce que nous appelonsl'Union européenne, dont le "pilier" est justement le fameux "couple" franco-allemand (le reste n'étant qu'"emballage" : protectorats économiques purs et simples comme à l'Est, en Grèce, au Portugal, en Irlande etc., "poissons pilotes" ayant intérêt à suivre les deux gros "requins" comme l'État espagnol, l'Italie ou la Belgique et États qui se demandent souvent ce qu'ils foutent là comme le Royaume-Uni, le Danemark, de plus en plus les Pays-Bas…).
Aujourd'hui, quand bien même la crise générale du capitalisme s'approfondirait et que continueraient à monter les "souverainismes" anti-UE comme on l'a vu aux dernières élections (c'était aussi un grand enjeu des présentes commémorations, tout comme l'embrassade Mitterrand-Kohl de 1984 visait à préparer la "phase ultime" de la construction européenne avec Maastricht), la perspective d'une guerre entre les deux États est hautement improbable.
Au contraire, les États français et allemand partagent plus que souvent les mêmes intérêts impérialistes sur la planète, comme par exemple le soutien indéfectible à l'État sioniste massacrant Gaza (déjà 1.400 mort-e-s, plus qu'en 2008-2009 lors de "Plomb durci") ou à la junte fasciste de Kiev qui écrase de bombes le Donbass (déjà près de 600 civil-e-s tué-e-s), et c'est en cela que les appels pacifistes larmoyants concernant ces deux conflits ("Tous nos efforts doivent être tendus pour imposer, aujourd’hui plus que jamais, le cessez-le feu à Gaza et en finir avec lessouffrances des populations civiles") sont cette fois non seulement ridicules, mais proprementhonteux ; au même titre que l'évocation de l'intervention néocoloniale BBR en Centrafrique, pour y "arrêter un possible génocide" dont les facéties de l'ancien protégé (le sous-préfet) Bozizé ont totalement créé les conditions – et ce n'est qu'un exemple parmi bien d'autres.
Le discours s'est par ailleurs à maintes reprises éloigné de la bluette pacifiste pour se tourner vers les très concrètes et actuelles préoccupations du Grand Capital européen : "L'Europe doit ouvrir une perspective de croissance, d'emploi, de solidarité, mais également de culture, d'éducation, de savoir, a déclaré François Hollande. Pour y parvenir, beaucoup dépendra de l'amitié entre la France et l'Allemagne" ; et la tonalité européo-pacifiste de l'évènement ne s'estnullement avérée incompatible avec des tirades patriotardes bleu-blanc-rouge du meilleur cru, invitant à "célébrer le patriotisme" mais en précisant bien que "célébrer le patriotisme, ce n'est pas s'éloigner de l'Europe" – tentative de synthèse bienvenue à l'heure où les tensions inter-impérialistes et les national-chauvinismes réactionnaires qu'elles portent s'exacerbent d'un bout à l'autre de la planète et où (on l'a dit) les tendances à vouloir "retirer ses billes" de la construction UE explosent dans le bourgeoisie de nombreux pays (FN en "France", UKIP en Grande-Bretagne, Parti populaire au Danemark, Alternative pour l'Allemagne chez Gauck lui-même etc.) ; et puis après tout les Identitaires y ont déjà pensé, alors…
En bref, Hollande et Gauck qui rendent hommage aux victimes de la "Grande Guerre" et sanglotent au "plus jamais ça" c'est un peu comme Rajoy qui rendrait hommage aux victime du franquisme ou Berlusconi à celles des Chemises Noires : deux pantins grotesques à qui il est temps de dire d'aller se faire foutre ; et de lancer à la face qu'il y a une guerre qui ne s'arrêtera jamais jusqu'à la Victoire : NOTRE GUERRE DE CLASSE CONTRE EUX.
Aux noms des millions d'assassiné-e-s de 14-18 et de tous ceux depuis et aujourd'hui : NI OUBLI NI PARDON !
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Source : Servir le Peuple, le 04.08.2014