La «Commission Monsanto» approuvée par le Parlement européen

Les eurodéputés ont approuvé mardi la création d'une commission spéciale pour enquêter sur le processus de validation des pesticides dans l'UE. Cela fait suite aux multiples accusations d'intrusion de lobbys industriels dans la procédure de décision sur le glyphosate, réautorisé pour cinq ans fin novembre.

Neuf mois après leur première demande, les eurodéputés Éric Andrieu et Marc Tarabella ont enfin obtenu gain de cause. Le Parlement européen a approuvé, mardi, l'ouverture d'une commission spéciale sur le système de validation des pesticides par les instances européennes.

Souvent appelée «Commission », elle fait suite aux révélations par différents médias et ONG européens sur l'existence de biais dans le processus de décision européen et notamment d'une forte influence de certains industriels de l'agrobusiness comme l'américain .

Mi-septembre, l'ONG Global 2000 a notamment prouvé qu'une grande partie du dossier de réautorisation du glyphosate, un herbicide présent dans le Round up, produit phare de Monsanto, présenté par les autorités sanitaires européennes est un copier-coller d'un rapport écrit par un groupe de lobbying industriel, dont fait partie Monsanto. Le glyphosate a été réautorisé à la vente pour cinq ans à la majorité qualifiée des États-membres, fin novembre.

Selon le site du Parlement européen, cette nouvelle commission spéciale, qui sera constituée de 30 membres, aura pour objectifs d'«évaluer la procédure d'autorisation des pesticides dans l'UE, y compris la méthode utilisée et sa qualité scientifique, l'indépendance de la procédure vis-à-vis des entreprises, et la transparence du processus de prise de décisions ainsi que ses résultats».

Sous influence de l'industrie

La Commission devra aussi identifier les éventuels conflits d'intérêts «dans la procédure d'approbation» européenne et au niveau des organismes rapporteurs des Etats membres. Est implicitement visé le Bfr (Institut pour l'évaluation des risques), l'organisme public allemand en charge de rédiger le dossier sur le glyphosate, qui s'est avéré être sous influence des industriels des pesticides.

Par ailleurs, le Corporate Observatory a évalué, en juin, dans son rapport «Recruitment Errors», que près de la moitié (46%) des experts siégeant dans les panels scientifiques de l'Autorité européenne sur la et la sécurité des aliments (Efsa) avait des conflits d'intérêts financiers directs ou indirects avec les industries de l'agrobusiness et de l'alimentaire.

Les membres de la Commission, qui seront désignés le 8 février, auront alors neuf mois pour réaliser ces missions et rendre un rapport au Parlement.

Mardi, le Pesticide Action Network (PAN) a profité de l'occasion pour publier une étude selon laquelle une grande majorité des méthodes européennes d'évaluation des pesticides ont été «développées ou promues par des industriels»«Ces méthodes sont conçues pour empêcher une interdiction de pesticides dangereux et provoquent un abaissement de la protection du public et de l'», conclut le rapport intitulé «Industry writing its own rules».

L'ONG affirme que le groupe de lobbying industriel International Life Sciences Institute (ILSI) a réussi à infiltrer les panels de régulateurs de l'EFSA et de l'Organisation mondiale de la (). «L', la Commission européenne et l'EFSA n'ont pas bloqué ces intrusions de l'industrie et ont maintenu une défaillante sur les conflits d'intérêts, tranche le rapport. Dans 50% des cas étudiés, les régulateurs et l'EFSA ont eu des rencontres exclusives avec des industriels sur les méthodes [d'évaluation], en excluant d'autres acteurs

En parallèle, la Commission européenne étudie la légalité de la fusion entre Monsanto et le groupe de chimie allemand Bayer, qui souhaite acheter pour 59 milliards d'euros le géant des pesticides américain. Lundi, Bayer a annoncé être prêt à vendre une partie de ses activités dans le secteur des pesticides pour apaiser les préoccupations de la Commission européenne. Le rachat de Monsanto par Bayer réduirait un peu plus le nombre d'acteurs sur le marché déjà très restreint de la vente de pesticides. En réponse, la Commission européenne a de nouveau décalé la date limite de rendu de sa décision du 12 mars au 5 avril.

 

Source : Libération

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