2 professeurs de médecine interdits d’exercer pour lèse Big Pharma

Deux professeurs de médecine interdits d’exercer pour avoir critiqué sa Majesté sérénissime, Big Pharma. Que penser d’un conseil de l’ordre des médecins qui a laissé violer des dizaines de femmes, pendant 25 ans, par le voyou André Hazout ? Ce même conseil de l’ordre qui a été condamné par la justice pour ces manquements ! Ce monde tourne à l’envers jusqu’à la prochaine explosion populaire… LaNutrition.fr Avez-vous fait appel de la décision de l’Ordre des médecins ou allez-vous le faire ? Et Bernard Debré ?

Pr Philippe Even : Nous avons fait appel tous les deux et pris deux avocats, Maître Repiqué, ancien bâtonnier de Paris, et Maître Richard Malka.

Quels sont les motifs avancés par le Conseil de l’Ordre pour vous sanctionner ?

La condamnation invoque trois motifs :

– La non-confraternité pour avoir traité les allergologues utilisant la désensibilisation de charlatans, de gourous ou de marchands d’illusion. Nous avons eu tort. Ils ne font qu’appliquer les règles qu’on leur a apprises. Les vrais responsables sont les quelques universitaires sous-spécialisés dans l’allergologie, dont ils se sont fait un domaine réservé en fondant une série de collèges d’enseignement, d’académies et de sociétés de financement privé, qui leur donnent une couverture sociologique sans fondement scientifique (pas un de leurs articles en français n’est cité dans la littérature mondiale et un seul, qui d’ailleurs n’a pas porté plainte, est l’auteur de nombreuses publications internationales). Nulle part en Europe l’allergologie est une discipline universitaire nationale. Pas plus que la tabacologie ou la proctologie. Nulle part, elle ne délivre des diplômes nationaux, seulement des diplômes d’université dits « complémentaires » et  payants.- La volonté de mener une opération « à visée commerciale ». Autrement dit, nous aurions écrit un livre de 900 pages portant sur 4000 médicaments, qui a nécessité plus d’un an de travail à plein temps, pour gagner de l’argent. Le livre a eu un succès que nous n’avions pas prévu, puisqu’il a été épuisé en librairie dès le premier jour, tant nous étions loin de prévoir un tel impact, qui reflète non pas la qualité du livre, mais le besoin des citoyens d’obtenir des informations le plus fiables possible, d’auteurs indépendants des pouvoirs publics et de l’industrie pharmaceutique.

– La contestation, sur certains points, dont la désensibilisation et les statines, de ce que le Conseil de l’Ordre, qui n’en sait rien, appelle : « les données acquises de la science » et par conséquent, dit le Conseil : « nous aurions remis en cause la compétence et l’honnêteté des médecins, notamment allergologues (qui avaient porté plainte) et cardiologues (qui n’ont pas porté plainte), faisant ainsi courir aux malades « un risque médical réel, s’ils arrêtaient leur traitement » ».

Cette sanction est-elle un avertissement lancé à tous les lanceurs d’alerte ? Peut-on encore remettre en cause des traitements qui ont été validés par les autorités sanitaires

Pour moi, la sanction du Conseil de l’Ordre vise à décrédibiliser les auteurs de ce Guide, qui se veulent en effet, sur certains points, des lanceurs d’alerte au service exclusif des patients et des médecins. Je rappelle que le Guide donnait une liste de 60 médicaments à retirer du marché, qui était très proche de celle de la revue Prescrire, dont 3 ou 4 ont été finalement effectivement retirés, et qu’il annonçait de futurs accidents thérapeutiques graves, en particulier avec les pilules de 3ème et 4ème génération, un an avant que ces accidents n’éclatent.

Il y a dans cette sanction la volonté de faire peur et d’empêcher les médecins de contester l’utilité ou le degré de risque des médicaments, contre l’avis des agences de santé considérées par les pouvoirs publics comme des références établies, n’ouvrant pas matière à débat ou controverse.

Nous maintenons que 40 ans de laxisme, d’incompétence, de politique de l’autruche et de corruption, ont conduit à la situation presque irréversible d’aujourd’hui, avec 40% de médicaments remboursés inutiles ou peu utiles, dont 20% avec des effets secondaires gênants et 5% très dangereux, 37 milliards d’euros de dépenses de médicaments, 1,5 fois celle des autres pays, pour l’unique bénéfice de l’industrie pharmaceutique, 20.000 morts et 100.000 hospitalisations pour accidents thérapeutiques recensées (certainement beaucoup plus, car la majorité ne sont déclarées ni en ville, ni à l’hôpital).

Nous pensons que la France a besoin de  lanceurs d’alerte et qu’elle devrait non pas seulement éviter de les attaquer, mais encore les inciter et les protéger, comme aux États-Unis. Elle aurait plus besoin encore d’un organisme indépendant des firmes et des pouvoirs publics. La revue médicale Prescrirejoue ce rôle, mais avec des moyens relativement limités et seulement 15000 lecteurs médecins. Elle remplit pourtant cette fonction de guide et de vigile infiniment mieux que l’ont fait et le font encore nos agences nationales ou nos pouvoirs publics (même si certaines structures comme la Commission de Transparence de la Haute Autorité de Santé émettent des avis que nous considérons comme généralement excellents, mais, malheureusement, lorsqu’il s’agit de fixer les prix et les remboursements, ces avis ne sont pas écoutés par le Comité Économique des Produits de Santé, organisme interministériel non médical et secret, qu’il importe de supprimer).

En écrivant le Guide des 4000 médicaments, adressiez-vous un message au public ? Aux médecins ? Aux deux ?

Notre Guide s’adressait aux médecins généralistes et aux patients. Ce sont eux qu’il faut informer de façon claire et indépendante. La thérapeutique, c’est avant tout une affaire de dialogue médecin-malade, où les médicaments ont évidemment leur place, mais pas toute la place. C’est ce dialogue que nous avons voulu enrichir, pour que les patients n’hésitent pas à questionner leur médecin, que ceux-ci les informent le plus clairement et indépendamment possible, y compris en leur donnant leurs sources d’information. Un médecin qui lit Prescrire n’est pas un médecin qui lit Le Quotidien du Médecin, et les malades doivent apprendre à identifier les uns et les autres. Un malade ne devrait pas se laisser traiter sans tenter de comprendre. Nous savons bien que beaucoup de médecins exercent ainsi leur métier et souhaitent ce contact de confiance avec leurs malades. Ce sont aux médecins généralistes que notre Guide s’adressait, parce que nous les savons curieux et avides de connaissances et désireux, par vocation, de se mettre au service de leurs patients. Eux, soignent des malades. Les spécialistes universitaires des hôpitaux, assurés de leurs savoirs pourtant souvent lacunaires, contestables ou périmés, ne soignent de plus en plus que des maladies, de façon quelque peu déléguée et robotisée. Le lien personnel médecin-malade a disparu des hôpitaux et il n’a pas la même qualité chez les spécialistes de ville que chez les généralistes. La médecine, pour nous, doit être recentrée sur les médecins généralistes et non sur les hôpitaux. Les généralistes veulent savoir, les spécialistes croient savoir et parfois à tort.

Renonçant à leur donner une formation continue indépendante, on leur impose des « recommandations », alors qu’il s’agit de leur laisser ce qui fait la grandeur de leur métier, la liberté informée de prescrire. Malheureusement, les généralistes ont aujourd’hui perdu une grande part de cette liberté d’action, contraints de prolonger quasiment les yeux fermés, les ordonnances hospitalières, souvent rédigées de façon quasi automatique par les internes, en même temps qu’ils sont encadrés par des recommandations officielles, trop souvent scientifiquement non justifiées et qu’ils sont incités à suivre pour recevoir une mini-rémunération supplémentaire, une situation insupportable quand on connait le fonctionnement interne de nos agences de santé, leur lenteur, leur dogmatisme, leur difficulté à se remettre en cause, leur soumission aux pressions de l’industrie.

Ces contraintes imposées ne respectent pas l’individualité des patients. La valeur d’un médicament n’est qu’une valeur moyenne approximative et toujours matière à controverse. Les résultats obtenus dépendent surtout de la pertinence du diagnostic, des doses, de la durée, de l’âge, du sexe, des pathologies et des médicaments associés, susceptibles d’interagir les uns avec les autres, et il dépend aussi du mode de vie, de l’environnement, etc. Les recommandations ne devraient être que des avis ou des conseils généraux et en aucune façon des quasi-obligations, qui placent les médecins en situation d’être condamnés en justice s’ils ne les respectent pas.

Malheureusement, jamais les pouvoirs publics n’ont été capables d’informer les patients et c’est pourquoi nous avons cru que notre Guide pourrait être utile, malgré ses imperfections. La seconde édition, pour la fin de cette année, sera, nous l’espérons, mieux adaptée à nos objectifs (il est à noter qu’un certain nombre d’universitaires, membres inamovibles des commissions des agences de l’Etat et directement responsables d’une situation qu’ils n’ont jamais dénoncée, ont cru discerner un très grand nombre d’erreurs dans notre Guide, sans d’ailleurs jamais préciser lesquelles. Ils ont annoncé, à l’époque, qu’ils allaient dans les 3 mois sortir un Guide « officiel » – ! – qui, 18 mois après, n’a toujours pas vu le jour. C’est qu’un Guide comme celui-là, c’est un travail d’analyse et de lectures à plein temps).

Nous pensons enfin que pour être un bon thérapeute, il ne suffit pas d’être pharmacien ou médecin de grande expérience personnelle. Quelle que soit leur activité, les médecins ne voient, au maximum,  que quelques dizaines ou parfois centaines de malades atteints d’une maladie donnée. Ils ne peuvent s’affranchir de l’étude critique attentive des essais cliniques publiés qui portent sur des milliers de malades. L’expérience est importante, mais la culture thérapeutique l’est autant.

Lire aussi : Est-ce la fin des illusions médicales, par le Pr Claude Béraud

Pouvez-vous expliquer aux internautes comment les laboratoires s’assurent de la « proximité » de certains experts, ce qui permet de contrôler le discours des sociétés savantes, des revues médicales, des agences sanitaires, et jusqu’aux médias grand public comme les grandes émissions de TV sur la santé….

D’abord une remarque : il n’est plus légitime de parler de laboratoires pharmaceutiques, dès lors que la recherche n’est de loin plus la préoccupation de ces structures. Je préfère parler d’entreprises ou de firmes. Cela n’est en aucune façon déshonorant et cela est plus vrai.

Vous parlez de « proximité ». Ce n’est pas de cela qu’il s’agit et appelons un chat, un chat. Il s’agit de connivence rémunérée, c’est-à-dire, soyons clairs, de corruption de certains experts universitaires. J’y consacrerai un livre au mois de septembre. Ils ne sont qu’une minorité, de 5 à 10 par grande discipline, mais ils font la loi, car les autres, occupés ailleurs, auprès de leurs malades ou de leur laboratoire de recherche, ne s’intéressent guère au domaine du médicament, où ils font preuve d’une crédulité, d’un suivisme passif, d’une naïveté assez confondants.

Le chainage est simple : l’industrie pharmaceutique réalise les essais cliniques sur les molécules qu’elle choisit, dans le domaine qu’elle choisit, là où il y a un grand marché, c’est-à-dire les maladies fréquentes et chroniques des pays riches, et non pas en fonction des problèmes de santé publique prioritaires. Elle réalise ces essais dans le secret (elle refuse toujours d’ouvrir ses dossiers, qui ne sont accessibles qu’au cours des procès qui lui sont faits par les patients ou par les agences gouvernementales, procès où elle a toujours été condamnée à des milliards de dollars d’amendes pour mensonges et dissimulation des risques).

A 500 millions l’essai, elle ne peut se permettre de conclusions qui ne soient pas positives, au moins sur quelques points. Elle conduit ensuite l’analyse des résultats elle-même, écarte les données gênantes, n’informe même pas les malades qu’elle a attirés dans les essais et fait rédiger les articles par ses propres médecins rédacteurs (« ghost authors »). Les articles sont ensuite cosignés les yeux mi-clos par les experts universitaires invités (les « guest authors »), qu’elle rémunère lourdement pour cela (de 20000 à 100000 dollars) et les fait, le plus souvent qu’elle le peut, accompagner d’éditoriaux favorables, rédigés par d’autres experts tout aussi rémunérés que les précédents. Elle les diffuse ensuite à la tribune des congrès, qu’elle programme, organise et finance, et parfois même au cours de séminaires satellites, dont les comptes-rendus seront publiés par les grands journaux, de préférence à ceux des congrès eux-mêmes ( !). Les articles sont ensuite publiés dans les journaux qu’elle commandite et subventionne, même les plus grands, car aucun ne peut survivre sans son appui.

Ce faisant, elle assure du même coup la notoriété de ses experts universitaires, dont le nom revient sans cesse dans les grands journaux internationaux (parfois chaque semaine !!!). Elle en fait ainsi des « opinion leaders » et même des « key opinion leaders » (KOL), qui influencent de façon déterminante les sociétés, dites savantes, de leur discipline, qui elles aussi ne peuvent survivre que grâce aux subventions de l’industrie, qui leur procure 90% de leurs recettes.

Ces sociétés émettent alors des recommandations thérapeutiques, inspirées ou directement rédigées par les KOL, reprises ensuite à peu près à l’identique, par les Agences de santé gouvernementales, qui s’entourent elles-mêmes pour les rédiger de certains de ces mêmes KOL. Ces recommandations, nationales ou internationales, s’imposent alors aux médecins, de sorte que la boucle est bouclée et qu’en pratique l’industrie pharmaceutique tient presque seule la plume des prescripteurs (à propos des KOL, il est significatif de constater que ces fonctionnaires de l’État placent leurs noms et titres universitaires en caractères gras à la première page des articles auxquels ils prêtent leur nom, mais que pour connaître les 3, 5, 10 ou 20 contrats financiers personnels et jusqu’à 50, les liant à autant de firmes pharmaceutiques, il est nécessaire d’aller les chercher sur le site Web des journaux).

Lire aussi : Quand Le Monde refuse de publier un billet du Dr de Lorgeril

Les médecins qui soutiennent votre condamnation (il y en a) vous reprochent notamment d’avoir abusé des leviers médiatiques et de n’avoir pas prouvé vos dires sur le cholestérol et les statines. Que leur répondez-vous ?

Ce sont les médias qui, après l’affaire du Médiator (où la Présidence de la République nous avait demandé un rapport), nous ont invités à parler et non l’inverse, parce que, enfin, après les scandales de santé publique à répétition depuis 20 ans, ils ont compris que rien n’allait derrière le décor officiel, systématiquement rassurant, de nos agences successives.

Nous n’aurions pas prouvé nos dires sur le cholestérol et les statines ? J’ai écrit un livre entier sur le sujet, avec le résumé et les données chiffrées de la plupart des essais publiés, mais lequel de mes détracteurs les a lus ? Je veux dire lus et travaillés ? Après enquête, je dis : aucun, et aucun n’accepte une confrontation publique. C’est que la vérité fait toujours peur à ceux qui l’ont longtemps étouffée. Les marche-arrière et les virages sont difficiles. Le pire des dangers n’est pas l’ignorance, mais la conviction aveugle et quasi religieuse. Pour avoir un débat, il faut au moins accepter d’écouter l’autre et pour arbitrer, remonter aux sources, c’est-à-dire aux données publiées. Mais les cardiologues qui nous critiquent ne font jamais référence à des résultats chiffrés, seulement à un dogme et une phraséologie générale, dont jamais aucune preuve n’est avancée. Leurs discours n’est fait que d’incantations et d’opinions, pas d’informations. Ils psalmodient toujours, au fil des années, la même vieille chanson instrumentalisée par l’industrie pharmaceutique, qui s’y est taillé le plus grand marché de médicament du monde, devant les anticancéreux et les antidépresseurs, sans jamais, je dis bien jamais, remonter aux sources scientifiques. A quoi sert-il alors de mettre sur la table des centaines de références, si personne ne veut examiner les essais eux-mêmes et seulement les résumés et les éditoriaux ou les seules conclusions de métanalyses falsifiées (c’est démontré, pièces en main) ou le simple discours ambiant ? Dès lors, que voulez-vous que je vous dise ici ?

Peut-être résumer vos arguments pour ceux qui ne les connaissent pas encore.

On peut retenir dix points en bref :

1. Le cholestérol est le même chez les sujets qui font un infarctus du myocarde que chez ceux qui n’en font pas… Et cela semble n’étonner personne !

2.  L’infarctus est particulièrement fréquent chez les aborigènes d’Australie et les nomades du Sahel, qui ont un cholestérol moyen d’ 1,50g.

3.  Entre 1,5 et 2,7 g/l de cholestérol, il n’y a aucune augmentation de la mortalité coronaire, qui ne commence à s’élever qu’au-delà de 2,7 et surtout 3g/l (mais corrélation n’est pas causalité. La grippe et l’importation des bananes s’accroissent en hiver). Mais en utilisant les logarithmes, on transforme cette courbe, dite en « crosse de hockey » ou en « J allongé », en une droite régulièrement ascendante d’1,5 à 3 g. Il s’agit là d’un pur trucage statistique, réalisé à dessein, qui fait rire tous ceux qui connaissent la statistique. Un trucage simpliste, qui saute aux yeux et qui n’aurait de validité que si nous traitions des logarithmes de malades avec des logarithmes de statines.

4. Les plaques d’athérome ne sont pas des dépôts de cholestérol, mais des cicatrices inflammatoires chronicisées chez certains, pour des raisons génétiques et dues aux chocs de pression sur les courbures et bifurcations artérielles. Le cholestérol ne fait que transporter dans les macrophages les acides gras qui leur apportent l’énergie nécessaire à la réaction inflammatoire. Les cardiologues sont à côté de la plaque.

5. Personne n’est parvenu à créer des plaques d’athérome chez l’animal (30 références), même en perfusant du cholestérol pendant des semaines pour atteindre un taux sanguin 8 fois supérieur à la normale. On n’obtient alors que des dépôts de cholestérol, diffus dans tous les tissus, peau, œil, tendons, veines, foie, muscles… et même artères. Rien de commun avec l’athérome, mais ça ressemble aux formes graves d’hypercholestérolémie familiale, qui est une maladie génétique tout à fait à part, sans rapport avec l’athérome.

6. Les 70 essais cliniques des statines financés de 1994 à 2008 par l’industrie pharmaceutique (il m’a fallu 15 heures de travail pour analyser chacun d’entre eux) sont tous délibérément et lourdement falsifiés –  je ne dis pas biaisés, je dis falsifiés – à tous les niveaux :

– Exclusion de 80% des patients pour éviter les risques d’effets secondaires et fabriquer des patients « idéaux » (mais les résultats seront extrapolés à 100% de populations non sélectionnées).

– Double aveugle non respecté.

– Contrôle des patients tous les 6 mois seulement.

– Arrêt des statines par les patients dans 25% des cas.

– Prise de statines par le groupe placebo dans 15% des cas.

– 25% des patients perdus de vue.

– Critères d’évaluation multiples, chevauchants, subjectifs ou objectifs, souvent combinés de diverses façons, de telle sorte que quand le critère est cliniquement signifiant, il n’est pas statistiquement significatif et n’est significatif que quand il n’a pas de signifiance clinique.

– Résultats présentés sous forme de réduction relative et non de réduction absolue et sans évaluer le nombre de malades à traiter pour éviter un accident. Ainsi annonce-t-on 20% de réduction relative de la mortalité (exemple 80 vs 100) en 5 ans, sans dire que la réduction absolue par rapport au nombre de malades traités est de 20/2.000, soit 1% en 5 ans, soit 0,2% par an, soit 99,8% d’échecs, obligeant à traiter 500 malades pour écarter 1 accident par an ou 100 pour éviter 1 accident tous les 5 ans.

7. Malgré ces multiples biais, 82% des essais ne montrent aucun effet sur la mortalité coronaire et les accidents vasculaires cérébraux et 60% aucun effet sur les accidents cardiovasculaires, majeurs ou non.

8. En outre, ces effets soi-disant significatifs sont extraordinairement minuscules : sur 100.000 malades traités comparés à 100.000 non traités, 150 morts auraient été évités après 5 ans de traitement, soit 0,15%  des patients, obligeant à traiter plus de 600 malades pour écarter un décès par an, soit à 1.000 €/an  (médicaments, consultations, examens biologiques et d’imagerie, etc.), 600.000 € par décès soi-disant évité. Des résultats si minuscules qu’ils ont suscité un article quasi humoristique dans le British Journal of Medicine du 17 décembre 2013, montrant que les statines sont juste aussi efficaces qu’une pomme croquée chaque matin, mais avec plus de complications (l’étude, très sérieuse, porte sur 10 millions d’Anglais suivis 20 ans).

9. Même ces résultats infra-minuscules ne sont pas crédibles, car depuis 20 ans que les statines sont sur le marché, aucune diminution de la mortalité coronaire n’a pu leur être attribuée, leur effet éventuel s’effaçant derrière celui des antihypertenseurs, des antidiabétiques, de la lutte contre l’obésité et le tabac, et ceux de la prise en charge des infarctus du myocarde dans les 2 heures, dans les unités de réanimation.

10. Concernant les complications, il y a encore un livre à écrire. Elles ne sont en aucune façon anodines. Les essais cliniques de l’industrie, qui y consacrent …3% de la longueur des articles et qui ont tout fait pour écarter au préalable les patients à risque, ont dû pourtant stopper les études à cause des effets secondaires chez 10 à 15% des patients (complications musculaires, tendineuses, cutanées, neurologiques, psychologiques, sexuelles et nouveaux diabètes).

Vidéo : Michel de Lorgeril et l’arnaque du cholestérol et des statines

Des médecins vous accusent de mettre en danger la vie des patients s’ils interrompent leur traitement. Que leur répondez-vous ?

Il y a plus de risques à continuer les statines qu’à les arrêter. Quand les cardiologues se décideront ils enfin à lire par eux-mêmes, ne serait-ce que  4 ou 5 des 70 essais cliniques sur lesquelles est fondée cette croyance quasi universelle ? Ils en sortiront abasourdis. Le dossier est totalement vide. L’histoire des statines tourne en dérision toute la profession médicale, à cause de quelques leaders d’opinion cardiologues américains, puis hélas français, dont il suffit d’examiner le curriculum pour comprendre leur totale dépendance à l’égard de l’industrie et en particulier, des firmes MSD, BMS, Pfizer et Astra-Zeneca. Mais il s’agit d’un marché qui a rapporté 300 milliards de $ à ces 5 firmes, l’un des marchés qui a permis que chacune d’elle se classe, en terme de valeur boursière, de chiffre d’affaire, de bénéfice annuel, devant Boeing ou la société Coca-Cola ! En nous attaquant à ce marché et à ces firmes, non seulement nous avons le sentiment et la volonté de nous battre au service des malades et peut-être plus encore au service de l’éthique et de la vérité scientifique. Personne ne nous fera taire.

Lire aussi : Le commentaire du Pr Even à l’étude qui assure que les patients qui arrêtent les statines mettent leur vie en danger

Dans Les Echos du mardi 1er avril 2014, un grand dossier sur les anti-PCSK9 présentés comme des « anticholestérol révolutionnaires », avec les interviews de 3 médecins liés à l’industrie pharmaceutique sans que ces liens soient portés à la connaissance des lecteurs. Que vous inspirent ce dossier et ces pratiques dans les médias grand public ?

Fascinant de voir l’industrie pharmaceutique annoncer des lendemains qui chantent, d’abord dans les journaux financiers avant les journaux scientifiques, pour s’attirer les investisseurs. Elle fait de même à Wall Street, à Londres, à Francfort et à Berne. C’est désormais pour elle une pratique constante, depuis qu’elle est devenue une simple succursale des grands fonds d’investissement dans le cadre d’un néocapitalisme financiarisé et non plus entrepreneurial. Il s’agit de créer une crainte, une angoisse et en même temps un espoir, des années avant de lancer un médicament, avant même que les recherches soient terminées, pour fabriquer d’avance un marché de pseudo-malades dont le cholestérol est le fleuron (Knock l’avait déjà fait dans son village en 1923 !) et cela, avec la bénédiction des pouvoirs publics, qui, au prétexte de développer la Santé publique et la prévention, au nom d’un principe de précaution injustifié, et de soutenir l’activité industrielle et les emplois, soutiennent n’importe quelle activité, utile ou non, dangereuse ou pas.

Les anti-PCSK-9 ne seront pas autorisés, si tout va bien, avant 2018, et peut-être ne le seront-ils jamais. Tant que l’industrie pharmaceutique et les cardiologues, les uns crédules et plutôt ignorants, et les autres, peu nombreux, corrompus à l’os, parviendront à faire croire aux dangers du CHO, on verra sortir de nouvelles merveilles, pour tenter de le réduire et réitérer le coup des statines et avant elles, des fibrates. Mais avec les anti-PCSK-9, attention : il ne s’agit pas d’un médicament ordinaire, mais d’anticorps monoclonaux ou de micro-ARN à 50 €/jour. Pas à 0,5 €/jour comme les statines. Il va donc falloir changer d’échelle et c’est pourquoi on commence à cibler la très rare hypercholestérolémie familiale homozygote et après, peu à peu, on tentera de l’étendre à toutes les hypercholestérolémies. C’est gros comme de la corde à puits. Les trois médecins que vous indiquez, lourdement liés à Sanofi, dont deux se sont déjà produits dans Science et Avenir, minaudant sur les dangers du cholestérol et les espoirs des anti-PCSK9 sont en action. Bien payés, ils continueront à le faire. Retenez leurs noms que personne ne connaissait jusque-là, vous allez les revoir.

Cela dit, les anti-PCSK9 seront probablement un peu plus actifs sur le cholestérol que les statines (dont vous pouvez quadrupler les doses, avec bien plus de complications, mais sans abaisser plus les LDL).

Mais à quoi bon abaisser le cholestérol, puisqu’il ne joue rigoureusement aucun rôle dans les maladies artérielles de l’adulte ? C’est le mythe des dangers du cholestérol qu’il faut détruire. Pour les statines, c’est pratiquement fait, car elles ne rapportent plus guère puisqu’elles sont génériquées. Donc, l’industrie s’en désintéresse.

De quelle manière comptez-vous poursuivre le combat sur le plan scientifique ?

Je prépare une grande overview sur les statines (pas ce qu’on appelle une métanalyse et qui est en réalité toujours une métasynthèse, destinée par effet de nombre, à rendre statistiquement significatifs des essais cliniques, qui, individuellement, ne le sont pas, au prix de réunir des essais extrêmement hétérogènes en terme de risques, d’âge, de sexe, de pays, d’ethnicité, de doses, de pathologies associées, etc., en se protégeant derrière un tour de passe-passe statistique puéril, destiné à faire croire qu’ils sont en réalité homogènes, à coup de CHI-2, I-2, etc., qui ne sont une fois de plus que des trompe-l’œil).

Je vais par ailleurs apporter la preuve absolue, irréfutable, visible au premier coup d’œil, de la falsification de la plus grande métanalyse qui ait été publiée sur les statines et qui visait à démontrer qu’il fallait traiter tout le monde, quelque soit le cholestérol et les risques cardiaques, donc en prévention primaire, comme en prévention secondaire, et aux doses les plus élevées possibles. Cette métanalyse est l’article le plus cité de la littérature médicale (6.000 fois). C’est elle qui a permis de multiplier par quatre le marché des statines (traiter tout le monde à haute dose). Elle repose sur un graphique montrant une relation linéaire entre la chute des LDL procurée par les statines et la réduction des complications cardiaques.

Problème : j’ai repris tous les essais cliniques sur lesquels est fondée cette figure décisive. Les données réelles n’ont rigoureusement aucun rapport, absolument aucun, avec les points représentés sur la figure. Il n’y a en réalité aucune relation entre réduction de la mortalité cardiovasculaire et réduction des LDL (le coefficient de corrélation est de 0,1 !). Il s’agit d’une pure et absolue falsification, venue du trop célèbre CTSU d’Oxford (Center of Trial Service Unit), organisme privé, essentiellement financé, et même statutairement, par les grandes firmes, et qui n’en est pas à son premier coup (son créateur, Sir Richard Doll, a été condamné, il y a 3 ans, par les tribunaux anglais pour avoir truqué, moyennant finances, les tests de sécurité des produits de Monsanto).

Comment les médecins et les patients qui le souhaitent peuvent-ils vous soutenir ?

Pour les généralistes, en s’informant eux aussi et en se battant ensemble pour la défense de leur liberté de prescription informée et responsable sans laquelle leur métier n’a même plus de sens, et pour les patients, en manifestant eux aussi leur volonté d’être informés, avec le désir d’établir un dialogue de confiance intelligente avec leur généraliste. Pour les cardiologues, la partie est perdue. Il faudra attendre la prochaine génération !

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Source(s) : LaNutrition, le 08.04.2014 / Le Libre Penseur

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