Aux États-Unis, la crise de 2008 refait surface avec le procès AIG

A crise hors norme, procès hors norme. Six ans après la nationalisation du groupe d'assurance américain AIG, s'ouvre, lundi 29 septembre à Washington, un procès inédit au cours duquel défileront à la barre un ancien président de la Réserve fédérale (Fed), Ben Bernanke, un ancien secrétaire au Trésor, Henry M. Paulson, ainsi que son successeur, Timothy Geithner, qui était à l'époque président de la Fed de New York.

A l'origine du litige, l'ancien patron d'AIG, Maurice Greenberg qui attaque le gouvernement américain pour la façon dont celui-ci a… sauvé, en 2008, le groupe d'assurance.

M. Greenberg après avoir dirigé AIG pendant près de 40 ans, avait été évincé du groupe en 2005 à la suite d'une enquête sur des malversations comptables.

Sous sa direction, le groupe avait multiplié les produits spéculatifs, notamment les dérivés liés aux crédits immobiliers « subprime », qui allaient être à l'origine de la crise.

Après son départ, M. Greenberg était resté malgré tout l'un des principaux actionnaires du groupe avec une participation au capital de 12 %, détenue grâce à son fonds, Starr International.

40 MILLIARDS DE DOLLARS RÉCLAMÉS

C'est par ce biais qu'en 2011, il a déposé plainte, contestant les conditions dans lesquelles AIG a été renfloué grâce à l'injection de 182 milliards de dollars d'aides publiques diverses au nom de la fameuse théorie du « too big to fail » (trop gros pour tomber). En échange, l'État avait nationalisé le groupe en prenant 79,9 % du capital.

Cette prise de participation se serait effectuée à des conditions spoliatrices, selon les plaignants, qui réclament aujourd'hui la bagatelle de 40 milliards de dollars au gouvernement.

L'action juridique a reçu le soutien de Kenneth Langone, l'un des fondateurs de la chaîne de magasins de bricolage Home Depot. Steven Cohen, dont le fonds spéculatif SAC Capital fait l'objet d'une enquête sur des délits d'initiés, a également été approché, avant de finalement décliner les sollicitations de M. Greenberg.

L'argument des plaignants, qui ont réuni plusieurs millions de dollars pour couvrir les frais de , consiste à démontrer que le gouvernement a violé le Cinquième Amendement de la Constitution américaine. Celui-ci interdit de réquisitionner un bien ou une propriété privée sans une juste indemnisation.

« UN CAS UNIQUE »

Pour eux, les fonctionnaires fédéraux ont utilisé AIG « comme un véhicule financier pour acheminer secrètement des milliards de dollars » vers d'autres établissements financiers, accuse la plainte déposée par l'avocat de Star International, David Boies. Ce dernier parle d'un « plan de sauvetage par des moyens détournés » de ces établissements sur le dos des actionnaires d'AIG. « Un cas unique dans l'histoire », souligne la plainte.

Ces accusations sont rejetées par les avocats du gouvernement, qui soutiennent que le fonds de M. Greenberg n'a pas la capacité juridique de porter l'affaire au nom des actionnaires d'AIG.

Le groupe, qui a depuis remboursé l'argent qui lui avait été prêté, a refusé de se joindre à la plainte.

« A ce jour, AIG a remboursé 205 milliards de dollars à l'Amérique, incluant un bénéfice de 22,7 milliards, avait déclaré le président d'AIG en 2013. Nous continuons à remercier l'Amérique pour son soutien », avait-il ajouté.

Si une première action juridique de la part de Starr International était restée sans suite en novembre 2013, le juge Thomas Wheeler a rejeté, en août, la demande de gouvernement de classer l'affaire, estimant que « la complexité des communications et les désaccords factuels soulignent fortement la nécessité d'un procès. » Celui-ci doit durer jusqu'au 18 novembre.

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Source : Le Monde / Par Stéphane Lauer, le 29.09.2014 / Relayé par

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