Le logiciel de paie des armées Louvois distille encore son poison

Le fameux système Louvois entraîne toujours des surcoûts pour le ministère de la Défense. Le ministre de la Défense attend le déploiement d'un nouveau système en décembre 2015.

Décidément le de paie des armées Louvois n'en finit toujours pas de distiller son poison… près d'un an après sa mise à mort par le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. Même si cela va toutefois un peu mieux. En septembre, les dépenses au titre du plan d'urgence lancé en septembre 2012 par le ministre pour assurer le versement des soldes des soldats sont en effet “plus faibles qu'antérieurement : 500.000 euros contre 1 million en début d'année”, comme l'a révélé le secrétaire général pour l'administration (SGA) Jean-Paul Bodin, lors de son audition à l'Assemblée nationale du 8 octobre. Mais, force est de constater qu'elles se poursuivent à bon rythme alors que l'armée fait le plus gros effort en matière de réduction d'effectif au sein de l'État (80.000 suppressions de postes entre 2009 et 2019).

Déstabilisés par les coupes massives et entraînée dans des opérations extérieures de plus en plus nombreuses, les militaires et leur famille commencent à trouver le temps long, trop long pour stabiliser la paie comme en témoigne la lettre ouverte d'une femme de militaires adressée à Jean-Yves Le Drian. En outre, selon Jean-Paul Bodin, la seconde partie de la campagne de régularisation “ne va pas sans difficulté puisque ce sont au moins 118.000 lettres qui ont dû être envoyées pour réclamer les indus de 2013. Lorsque les personnels ont quitté le ministère et sont à la recherche d'emplois, la marge de manœuvre du Trésor public s'avère très faible”. Ce second volet est en cours depuis le début de l'année et se poursuivra en 2015, précise le SGA.

Régulariser chaque militaire

Ce n'est pas nouveau mais les anomalies de Louvois se traduisent encore “par d'importants indus de paye et de moins-verser aux administrés”. Aussi, la seconde partie de la campagne de régularisation vise à traiter la totalité des dossiers et des anomalies : “il s'agit de calculer et de régulariser, pour chaque administré, le solde entre les paiements qui lui sont dus et les versements qui lui ont été effectués par ou hors Louvois, et de mettre ainsi ses droits à jour, a expliqué Jean-Paul Bodin. Cette campagne permettra non seulement de rétablir chaque administré dans ses droits, en lui versant ses dus, mais aussi de préserver les droits de l'État et le budget du ministère en recouvrant les sommes versées indûment”.

Interrogé sur le coût de ces tâches administratives, le SGA a répondu qu'il “n'a pas été procédé à une analyse du coût de recouvrement de l'indu par euro récupéré, ne serait-ce que parce que nous sommes loin d'avoir tout récupéré, et qu'il est difficile d'évaluer les moyens que nous devrons mettre en œuvre pour cela. Ainsi, après avoir dû augmenter à plusieurs reprises les effectifs du centre expert des ressources humaines et de la solde (CERHS) de Nancy, nous examinons l'organisation à mettre en place pour mener à bien la campagne de recouvrement 2015-2016″. Selon le député du Var, Philippe Vitel, co-auteur d'un rapport sur l'exécution du budget 2013, le ministère de la Défense a dû recruter 100 personnels civils au titre de la fiabilisation de Louvois au CHRS de Nancy.

Un nouveau de paie en décembre 2015

“Il est urgent de pouvoir disposer d'un nouvel outil”, a estimé le SGA. Le calendrier du remplacement de Louvois est jalonné par deux rendez-vous important : présentation de prototypes de logiciel de paie en décembre 2014, fournis par les candidats au cours du dialogue compétitif, et premier déploiement en décembre 2015. “Le déploiement complet devrait être effectif en 2017”, a expliqué Jean-Paul Bodin. Un calendrier qui semble très ambitieux, selon un observateur. Le ministre a confié à la direction générale de l'armement (DGA) le projet. Ainsi, le dispositif s'articule autour d'une équipe composée d'un binôme formé par le directeur de programme, appartenant à la DGA, et l'officier de programme, appartenant à la direction des ressources humaines du ministère (DRH-MD). L'équipe est actuellement composée de 12 personnes (17 en 2015) de la DGA et de 17 (23 en 2015) de la DRH-MD.

La procédure de passation de marché retenue, un dialogue compétitif, a débuté par la publication de l'avis d'appel public à candidatures le 1er février 2014. Le dossier de consultation des entreprises a été envoyé le 18 avril aux trois groupements sélectionnés :  l'américain Accenture associé au canadien CGI, le français Atos associé à Steria et enfin Sopra et sa filiale HR Access, selon nos informations. Le premier tour de dialogue a eu lieu du 13 juin au 24 juillet. Le suivant aura lieu au quatrième trimestre 2014 et les offres finales sont attendues début 2015, pour une notification au premier semestre 2015. Jean-Paul Bodin n'a pas communiqué les montants budgétés en raison de la compétition en cours. “Il va de soi qu'il y a une limite” en matière de coûts, a-t-il toutefois rappelé.

Les enseignements de ce flop

Après Louvois, le ministère “s'est efforcé de tirer le plus d'enseignements possible des difficultés rencontrées avec Louvois, en mettant en place, en début d'année, une procédure de revue régulière des devis et des projets”, a expliqué le SGA. Ainsi, comme c'est déjà le cas pour les programmes d'armement, pour chaque étape à franchir, un audit doit être réalisé par une délégation aux Systèmes d'Information d'Administration et de Gestion (SIAG), mise en place en 2013 et dirigée par un ingénieur de l'armement.

Réunie tous les deux mois, une commission des SIAG “se voit remettre un point de situation sur les programmes, en particulier les plus critiques, c'est-à-dire ceux qui ne sont pas dotés d'un responsable clairement identifié, ceux faisant l'objet d'une dérive en termes de délais ou de coûts ou encore ceux où surviennent des difficultés techniques”. Ce dispositif a été étendu aux responsables des systèmes d'information et de communication (SIC) de l'ensemble des états-majors et services qui effectuent eux-mêmes une revue des dossiers avant de les présenter en commission SIAG. Un système de pilotage qui apparaît enfin très serré.

Armée : vers un nouveau logiciel de paiement des soldes – 2013

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Source : La Tribune / Par Michel Cabirol, le 21.10.2014 / Relayé par

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